truth time (jade)

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Charlie avait passé la journée à réfléchir. Parler ou se taire, au fond de lui il avait pris la décision il y avait plusieurs semaines déjà, il avait juste manqué de courage jusqu’à présent. Il ne savait pas si c’était tout ce qui avait pu se passer avec Jethro qui avait fini par être le déclencheur de son besoin de parler avec Jade, ou s’il en avait juste eu assez de se dire qu’il était obligé de mentir. Ça le fatiguait de devoir toujours être sur ses gardes, de ne pas laisser passer le moindre détail qui pourrait le trahir. Il devait déjà faire attention à cause de son beau-frère, et là-dessus il avait encore la sensation de ne rien pouvoir contrôler, mais sur le reste, sur sa maladie, là-dessus il pouvait au moins en parler à Jade. Il devait le faire, sinon il avait l’impression qu’il allait imploser. Il avait la sensation d’avoir repoussé l’inévitable aussi longtemps qu’il le pouvait, mais l’heure était venue. Il arrivait à la fin de ses supposées deux semaines de vacances et il n’avait pas envie de devoir trouver une nouvelle excuse pour expliquer sa présence à la maison, et il avait encore moins envie de devoir recommencer à s’enfuir dès qu’il croyait entendre un bruit dans l’allée indiquant le retour de Jade ou d’Aaliyah. Il appréhendait cette discussion depuis des mois, et maintenant qu’il avait gardé le secret pendant aussi longtemps il savait que ça n’allait faire qu’empirer les choses, que sa femme allait se sentir trahie, inquiète, triste, énervée. Mais c’était trop tard maintenant, il en était arrivé au point où lui cacher la vérité plus longtemps était impossible alors il avait profité d’un jour où il n’avait pas croisé Jethro pour l’attendre dans le fauteuil du salon, trop nerveux pour vraiment réussir à lire ou même pour sortir se changer les idées. Il avait l’impression de se préparer pour le combat de sa vie et il n’avait pas envie de distraction, il avait juste envie que cette discussion soit finie. Il avait tenté de lire pendant tout l’après-midi avant de finalement entendre la clé de Jade tourner dans la serrure. Il sauta alors quasiment du fauteuil, se tournant aussitôt vers elle. Il devait avoir l’air d’un fou mais il était trop nerveux pour réussir à agir plus naturellement que ça. Il se força à respirer quand même un coup, histoire de ne pas l’inquiéter plus que nécessaire. « Hello, comment était ta journée ? » Demanda-t-il avant de venir l’embrasser rapidement, sachant très bien que ce simple geste devait être révélateur du fait que quelque chose clochait. C’était une habitude qu’il avait perdue depuis bien longtemps et généralement il ne prenait pas la peine de se lever du canapé pour venir la saluer après une journée de boulot. Il caressa rapidement son bras avant de reculer d’un pas, se demandant s’il valait mieux se lancer directement ou attendre un peu. Il avait passé la journée à y réfléchir mais il n’avait pas réussi à prendre de décision. Au final il décida de se lancer, ayant trop peur de se défiler et de ne pas oser dire ce qu’il avait à dire s’il attendait trop longtemps. « Il faut que je te parle d’un truc. » Lâcha-t-il donc un peu brutalement, venant se gratter la nuque d’un air embarrassé, se rappelant de toutes les raisons pour lesquelles il avait eu peur d’avoir cette conversation depuis des mois maintenant.

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Charlie se rendit vraiment compte qu’il l’avait abordée trop brutalement en la voyant lâcher ses sacs et il grimaça légèrement, se demandant s’il n’avait pas fait le mauvais choix en choisissant de mettre les pieds dans le plat. Réflexion faite, il aurait probablement dû lui laisser le temps de s’installer au moins, mais  maintenant que sa décision était prise, garder le secret lui paraissait insoutenable. Comme si tous ces mois de mensonges étaient en train de lui retomber sur la tronche d’un coup. Il se contenta de hocher la tête pour signifier que, oui, ça allait, et que oui, il allait bien, de manière totalement mécanique. Il n’avait pas envie d’échanger des amabilités, pas alors qu’il avait quelque chose d’aussi important à lui raconter. À lui avouer. Il sentit ses épaules s’affaiser légèrement en voyant sa réaction, elle avait été surprise mais à la voir comme ça, on aurait presque dit qu’elle s’attendait déjà à une mauvaise nouvelle. Alors certes, « Il faut que je te parle d’un truc » ce n’était pas le genre de phrases qu’il prononçait à la légère, et le fait qu’il lui ai quasiment sauté dessus ne devait pas l’aider à imaginer qu’il voulait lui parler de quelque chose de positif. Mais la vitesse à laquelle elle s’était mis sur la défensive l’avait tout de même surpris. Il s’éclaircit la gorge avant de se baisser pour ramasser les sacs qu’elle avait fait tomber et de passer rapidement dans la cuisine pour les lancer sur le comptoir. Les courses pourraient attendre. Il attrapa l’une de ses deux mains et la tira doucement vers le fauteuil, le nouveau canapé étant encore en cours de livraison. « Tu ferais mieux de t’asseoir je pense. » Ça non plus ce n’était pas de très bon augure alors forcément il ne pouvait pas lui reprocher d’être méfiante. Il attendit qu’elle se soit installée dans le fauteuil pour venir s’asseoir face à elle, sur la table basse. Il posa ses coudes sur ses genoux et tenta d’organiser ses pensées. Il avait passé une bonne partie des deux dernières semaines à réfléchir au meilleur moyen de lui annoncer mais maintenant qu’il se lançait vraiment et qu’elle était face à lui, les mots refusaient de venir, son esprit était totalement vide. Il se mordit rapidement la lèvre avant de se forcer à dire quelque chose, il fallait qu’il commence par quelque chose, sinon il n’aurait jamais le courage de lui dire. « Je sais que tu as remarqué que j’étais plus… distant ces derniers temps. » Il avait marqué une pause en plein milieu de sa phrase, cherchant le meilleur mot pour qualifier son comportement. Il pensait l’avoir bien trouvé, oui, il s’était montré distant, absent, étrange. Tout ça, et il était prêt à l’admettre. Il n’avait même pas envie de prétendre que l’annonce de sa maladie n’avait rien changé dans sa vie, dans leur vie, il savait que ce n’était pas vrai. Ce n’était pas le seul facteur, mais c’en était un déterminant. « Je ne t’en ai pas parlé avant parce que je ne voulais pas t’inquiéter. » Il marqua une nouvelle pause, d’à peine quelques secondes cette fois-ci, sachant très bien que maintenant qu’il avait commencé il ne pouvait pas se permettre de s’arrêter en plein milieu. Ça aurait juste été cruel. « Il y a quelques mois j’ai passé des examens et on a trouvé une tumeur. Je la traite, mes collègues font tout ce qu’ils peuvent, ils sont optimistes et si tout se passe bien je devrais pouvoir me faire opérer dans les mois qui arrivent. » Il avait dit tout ça d’une traite, comme s’il avait peur de se dégonfler s’il s’arrêtait à la fin de ses phrases. Il s’efforça de soutenir le regard de Jade, sa main toujours dans la sienne, s’attendant déjà au pire.

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Charlie essaya de caresser la main de Jade pour la rassurer, l’apaiser, mais elle ne tarda pas à se relever brutalement, récupérant au passage sa main. Le médecin, lui, resta assis sur la table basse, n’osant déjà plus affronter son regard. Elle avait toujours eu du caractère Jade et il s’était attendu à une réaction d’une telle envergure, elle avait besoin de bouger, de pleurer, de hurler, tout ça, ça ne l’étonnait pas et il voulait la laisser faire parce qu’il savait que ça l’aiderait. Il fallait attendre que l’orage passe un peu pour pouvoir discuter avec elle, et il savait bien que pour lui tout ça c’était devenu, pas banal, mais au moins admis, accepté en partie. Pour elle, elle devait avoir l’impression que le ciel lui tombait sur la tête, même s’il lui avait dit que sa vie n’était pas en danger dans l’immédiat elle risquait d’avoir du mal à digérer le fait que ça fasse des mois qu’il lui cache une information aussi importante. Il se frotta rapidement le visage, l’entendant effectivement lui reprocher de ne rien lui avoir dit jusqu’à présent, choisissant de se taire et de la laisser exploser, elle en avait besoin, ça lui ferait du bien de hurler ce qu’elle avait sur le cœur, quand bien même c’était pénible à entendre pour Charlie. Il savait qu’elle avait raison de se sentir trahie, il l’avait su au moment où il avait pris la décision de lui cacher sa maladie, mais ça n’avait rien changé. Il avait jugé à l’époque que c’était mieux comme ça, et même maintenant, il jugeait encore qu’il avait pris la bonne décision. Il se mordit la lèvre en l’entendant parler de leur couple voué à l’échec, lui ne l’avait jamais vu comme ça et ça lui brisait le cœur de l’entendre en parler comme ça. Ils n’étaient plus ce qu’ils étaient, c’était sûr, mais même après tout ce qui s’était passé ces derniers temps il n’avait jamais pensé que leur couple était voué à l’échec et il dû ravaler la réplique qui lui brûlait les lèvres pour ne pas envenimer encore plus la situation. Elle avait droit d’être en colère, et il espérait que c’était juste ça qui lui faisait dire ça. Il finit par se lever à son tour, pour bouger, lui aussi commençait à en avoir besoin, l’agitation de Jade était contagieuse. Il ne tenta pas de s’approcher et la laissa se resservir un verre sans rien dire. « Non je ne vais pas me faire opérer tout de suite. » Expliqua-t-il, gardant sa voix la plus calme possible, espérant que ça pourrait aider à la calmer elle. Heureusement qu’il ne lui avait pas dit qu’il n’était même pas encore sûr de pouvoir se faire opérer, pas au rythme où la tumeur progressait. « Mon chef m’a demandé de prendre un congé sabbatique pour me reposer, je ne travaille plus à l’hôpital depuis deux semaines et j’en avais assez de devoir te le cacher. » Perdu pour perdu… Il avait décidé d’être parfaitement honnête sur sa maladie, autant l’être tout autant sur les raisons qui l’avaient poussé à en parler aujourd’hui. Il restait persuadé que ça ne pourrait pas être pire, pas tant qu’il ne parlait pas de Jethro en tout cas. « Je savais que si je te le disais tu t’inquiéterais, et je savais que tu ne pourrais rien y faire. Après ta fausse couche je pensais que tu avais déjà assez de soucis comme ça et je voulais t’épargner ça ! Je ne l’ai pas fait pour une raison tordue. » Il avait volontairement repris ses mots, il comprenait qu’elle se sente trahie mais il ne l’avait pas fait juste pour lui faire du mal, il avait sincèrement pensé que c’était sa meilleure option et il le pensait encore. Rien ne pourrait le faire changer d’avis là-dessus. « Je suis désolé que tu te sois inquiétée quand même, que tu aies pensé que c’était la fin de notre couple. » Il s’éclaircit la gorge, rien que l’idée le mettait mal à l’aise, il n’avait pas réalisé à quel point cette idée avait trotté dans l’esprit de sa femme et il avait honnêtement du mal à le digérer. « Je pensais sincèrement que c’était la meilleure chose à faire, je n’ai pas bien mesuré l’impact que ça avait quand même sur toi. Sur nous. » Il avait retrouvé le courage de la regarder en face, il avait besoin qu’elle comprenne qu’il disait la vérité, qu’il ne l’avait pas fait pour lui faire du mal, tout l’inverse même.

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Charlie ne réussit pas à empêcher une grimace de venir se former sur ses lèvres en entendant le mot « mourant ». Il n’était pas mourant. Il avait une maladie potentiellement létale, c’était totalement différent selon lui, il n’allait pas mourir, pas maintenant, pas comme ça, et il avait l’impression que Jade n’avait pas encore totalement assimilé ça. Mais comme elle le lui avait demandé il essayait de se mettre à sa place, et il pouvait comprendre que la pilule soit difficile à avaler. Il s’y était attendu après tout, c’était même pour ça qu’il avait attendu aussi longtemps avant de lui en parler. Bien sûr, ça n’avait fait qu’empirer les choses, et le pire, c’était qu’il l’avait fait en connaissance de cause. Peut-être qu’une petite partie de lui-même avait espéré que sa maladie disparaîtrait assez rapidement pour que Jade n’ait jamais besoin d’être au courant, peut-être qu’il avait juste voulu garder ça pour lui parce que partager cette information reviendrait à lui donner du poids, du crédit, chose qu’il n’avait pas été prêt à faire. Il ne l’était d’ailleurs toujours pas, s’il en parlait aujourd’hui c’était contraint et forcé et ça, Jade devait bien le ressentir, en tout cas c’était ce qu’il devinait au vu de ses réflexions. Il finit par se rasseoir à son tour, imitant Jade, se retenant de venir attraper ses mains dans les siennes, sachant très bien qu’elle risquait de le repousser. Il avait envie de l’interrompre pour lui expliquer que ça ne serait jamais arrivé, qu’elle se montait la tête et que c’était justement pour ça qu’il avait préféré lui épargner ça, mais elle ne lui laissait pas assez de temps pour réfléchir à la bonne formulation pour ne pas la braquer encore plus. Il glissa sa langue sur ses dents et baissa la tête en s’entendant traiter de lâche, son envie instinctive étant de se défendre sur ce point là. Mais plus les secondes passaient et plus il se rendait compte qu’il avait bien fait de se taire. Elle avait raison, il avait été lâche, c’était à croire qu’elle le connaissait mieux qu’il ne se connaissait lui-même. Étonnamment, cette réalisation ne l’aidait pas à mieux vivre la dispute qu’ils étaient en train d’avoir et il passa une main dans ses cheveux, plus pour s’occuper qu’autre chose, avant de se forcer à relever les yeux vers Jade. Son regard était désormais simplement triste, parce qu’il se rendait mieux compte de la façon dont il l’avait trahie. Il força son estomac à se dénouer légèrement et à ne pas penser à toutes les autres façons dont il l’avait trahie récemment. Ce n’était vraiment pas le moment de lui parler de Jethro. « Tu as raison. J’ai été lâche et je me suis menti à moi-même. Je pense que j’avais peur de t’en parler parce que ça aurait voulu dire que c’était vraiment en train d’arriver. » Il avait choisi de se montrer honnête, candide même presque, parce qu’il lui devait bien ça après tout, mais aussi parce qu’elle le poussait à voir la réalité en face. Il ne pouvait plus nier l’évidence, sa vie était en danger, et le poids de cette réalisation l’écrasait déjà. « Je sais que c’est pas ce que tu veux entendre mais je monitore énormément mon état de santé depuis que je sais que je suis malade, je n’aurais pas simplement disparu du jour au lendemain, pas à moins de me faire écraser par un bus. » Mais ça, à priori, il y avait toujours autant de chances que ça lui arrive, malade ou pas malade. « Si j’avais eu le moindre doute que ça puisse arriver je n’aurais jamais fait ça, j’ai besoin que tu me croies. » S’il avait appris qu’il avait plus de chance de faire un anévrisme ou de mourir de morte subite il ne lui aurait pas caché, mais là il n’y avait pas eu énormément de risques qu’il s’éteigne sans le voir venir un minimum. « Mais tu as raison, j’ai été égoïste, et j'ai merdé. J’ai voulu garder ça pour moi parce que c’était plus facile pour moi de le gérer si j’étais le seul au courant. » Souffla-t-il, se rendant compte en le disant à quel point ça avait été vrai. Il avait fallu que Jade lui crie dessus pour qu’il le réalise. Il avança doucement sa main vers sa femme, tentant de la poser gentiment sur son genou, s’attendant à tout moment à ce qu’elle le repousse et se relève pour remettre de la distance entre eux. Il n’aurait pas pu la blâmer.

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Charlie avait volontairement laissé la question filer parce qu’il savait que ça ne ferait qu’empirer la colère et l’amertume de Jade. Il allait bien falloir qu’il lui dise que le collègue qu’ils avaient croisé au mariage avait été au courant justement, qu’il avait probablement tenté de la mettre en garde. Et surtout que Jethro aussi le savait, il ne lui dirait pas que ça avait fini par lui faire du bien de lui en parler, il n’oserait jamais, mais il se devait de lui dire qu’il était au courant. Ce serait pire si elle venait à l’apprendre plus tard et par l’intermédiaire de son frère, avec son tact et sa compassion habituelle. Il avait envie de lui dire mais les mots ne sortaient pas, il voulait attendre qu’elle ait au moins un peu eu le temps de digérer le reste des informations qu’il venait de lui balancer, et il eut l’impression que ça commençait un peu quand elle lui expliqua qu’elle aurait besoin de preuves. Il avait des résultats d’analyse qu’il avait conservées depuis le premier diagnostic et il espérait que ça pourrait jouer un peu en sa faveur. Au moins pour lui prouver que son état était relativement stable, qu’il n’était pas à l’article de la mort. Il avait été sur le point de se relever pour aller les chercher quand elle avait fondu en larme et il avait alors resserré légèrement sa prise sur son genou, essayant de la calmer comme il le pouvait. Ses épaules s’affaissèrent encore un peu plus en l’entendant, parce qu’il savait qu’elle avait raison et qu’il avait peur de ne pas réussir à lui faire comprendre que ce n’était pas parce qu’il n’y avait pas cru qu’il avait fait ce choix. « Je sais que tu aurais été là pour moi, je le sais. Et justement, je crois que j’avais besoin de digérer ça tout seul, c’était plus simple d’appréhender tout ça en sachant qu’au moins toi tu ne t’inquiétais pas pour moi. Je sais que tu aurais essayé de m’aider et j’aurais eu l’impression d’étouffer encore plus. » Il savait qu’elle risquait de ne pas apprécier sa remarque mais il avait décidé de se montrer candide envers elle, de ne plus rien lui cacher concernant sa maladie, et il comptait bien suivre ce principe jusqu’au bout, même si ça ne plaisait pas nécessairement à Jade. Il ne pouvait pas se défendre plus que ça là-dessus, il l’avait évincée, même s’il n’aimait pas ce terme, elle avait raison et il le savait. Il avait voulu l’écarter de cette partie de sa vie et ce n’était que maintenant qu’il se rendait compte à quel point ça devait être difficile à digérer pour sa femme. Il caressa doucement son genou avant de se lever finalement et de se rendre dans le bureau. Il revint quelques secondes plus tard avec une pochette contenant tous les documents médicaux qui concernaient le suivi de sa maladie. Il la posa sur la table basse, à portée de mains de Jade, pour quand elle aurait envie de les regarder. « Tout est là-dedans. » Expliqua-t-il en désignant la pochette d’un geste du menton. Il ne voulait plus lui cacher quoique ce soit à ce sujet et il voulait qu’elle se sente libre d’avoir toutes les informations que lui-même avait, de lui poser toutes les questions qui lui traversaient l’esprit. Mais avant ça, il avait encore une information à lui demander. « Très peu de médecins étaient au courant à l’hôpital, parce que j’ai demandé au collègue qui s’occupe de moi d’être discret. Mark, du mariage, il l’avait appris par accident. » Expliqua-t-il, se souvenant du regard noir qu’il lui avait lancé à l’époque en comprenant qu’il essayait de mettre la puce à l’oreille de Jade. Il s’éclaircit la gorge et vint reposer sa main sur le genou de la jeune femme. « Jethro aussi est au courant. » Il avait préféré lancer l’information comme ça, de peur de trop réfléchir et de se dégonfler. Trop tard pour revenir en arrière maintenant et il se sentait presque soulagé de l’avoir dit. « Il m’a surpris à un moment où j’étais malade il y a quelques semaines, je n’ai pas réussi à le lui cacher plus longtemps. » Ce qu’ils avaient fait après qu’il l’ai accompagné à l’hôpital, ça par contre, il allait bien se garder de le lui raconter.

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Charlie laissa échapper un petit soupir las en l’entendant s’offusquer, oui il avait été persuadé qu’elle aurait eu tendance à l’étouffer, sans s’en rendre compte, sans le faire exprès, mais lui aurait trouvé ça contraignant. Le simple fait qu’elle soit au courant lui donnait déjà l’impression d’avoir plus de mal à respirer mais il ne prit pas la peine de répondre. Elle était en droit de penser qu’il avait tort, mais lui ne pouvait pas changer ce qu’il ressentait. Il revint avec son dossier médical, ne sachant pas trop si elle comptait le lire ou pas, au moins elle l’avait à disposition si elle en avait besoin. Elle lui avait demandé des preuves et il les lui fournissait, ne sachant pas faire quoi d’autre que de rebondir à ses demandes et à ses critiques au fur et à mesure qu’elles lui arrivaient en pleine tronche. Il hocha la tête en silence pour confirmer que la présence de son collègue au mariage avait joué sur son envie de partir, comprenant bien que le moment n’était pas bien choisi pour expliquer plus en détail tout ce qui avait pu motiver sa décision de l’autre fois. Sans compter qu’il pensait plus urgent de lui donner la dernière information concernant le sujet qui risquait de vraiment la blesser : le rôle de Jethro. Il ne put s’empêcher de grimacer en entendant sa réaction, c’était à peu près à ça qu’il s’était attendu mais ça ne rendait pas l’expérience plus agréable pour autant. Il la laissa se relever sans chercher à la retenir, faisant glisser sa langue sur ses dents en attendant qu’elle digère un peu l’information. Au moins sur ce plan là Charlie était persuadé de ne rien avoir à se reprocher, ce n’était pas comme s’il avait véritablement eu le choix, Jethro aurait fini par comprendre ce qu’il se passait et ça aurait été cruel de le laisser dans l’inconnu alors qu’il se doutait bien qu’il avait un problème de santé. Il ne pouvait pourtant pas blâmer Jade pour sa réaction, même si sa réflexion le fit grincer des dents. « C’est pas comme si j’avais vraiment eu le choix avec lui. » Souffla-t-il en relevant les yeux vers Jade, essayant de garder un ton calme et neutre autant que possible. Mais il avait toujours autant tendance à se crisper quand il parlait de Jethro avec sa femme, peut-être même encore plus qu’avant. Les raisons étaient différentes désormais mais sa réaction était la même : le sujet le mettait mal à l’aise. « Qu’est-ce que tu voulais que je fasse ? Il savait déjà que j’étais malade, je n’allais pas le laisser s’imaginer le pire sans donner la moindre explication. » Il détourna les yeux en se rendant compte que c’était un peu ce qu’il avait involontairement fait avec Jade, mais s’il avait su qu’elle s’inquiétait, qu’elle se posait autant de questions alors il lui en aurait parlé avant. Il se gratta la nuque, toujours légèrement mal à l’aise. « Je sais que c’est pas évident à digérer, moi non plus j’avais pas envie qu’il soit au courant avant toi. Mais c’était un concours de circonstances, un accident. J’ai pas choisi de lui en parler avant toi. » Tenta-t-il d’expliquer avant de se relever à son tour, faisant quelques pas vers Jade. Il s’attendait à ce qu’elle le frappe ou s’en aille à tout moment, mais il avait au moins la satisfaction d’avoir pu dire ce qu’il avait eu à lui dire.

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Charlie haussa les épaules, il n’avait aucune idée de ce qu’il attendait d’elle. Rien, probablement. Qu’elle lui pardonne ? Qu’elle ne le quitte pas ? Qu’elle arrête de remuer le couteau dans la plaie ? Il n’en savait rien et il sentait bien que ça ne ferait rien pour arranger la situation mais il choisit de se taire. Peut-être qu’elle avait juste besoin de se défouler un bon coup, peut-être qu’elle avait besoin de s’énerver, de crier, de pleurer pour commencer à digérer ce qu’il venait de lui dire. C’était ce qu’il espérait, que ce n’était qu’une réaction à chaud, comme lui avait pu en avoir une en l’apprenant il y a quelques mois. Il voulait penser que ce n’était pas la fin, qu’elle allait finir par s’en remettre, qu’ils allaient finir par s’en remettre. Il sentit sa mâchoire se serrer par automatisme quand elle reprit son ton sarcastique et recommença à sous-entendre qu’il avait eu plus d'égard envers Jethro qu'envers sa propre famille, ce n’était pas comme ça que ça s’était passé mais il avait fini par réaliser qu’il ne réussirait pas à lui faire entendre raison sur ce point là. Pas ce soir en tout cas. Il avait voulu être honnête mais à voir sa réaction il était en train de se demander s’il n’aurait pas mieux fait de garder cette information pour lui. Après tout ce n’était pas comme s’il était totalement honnête avec elle en ce moment même non plus. Son regard se fit plus triste quand elle lui expliqua que c’était elle qui avait besoin d’air, il était prêt à l’accepter, il n’avait pas le droit de l’empêcher de réagir à sa manière de toute façon et il pensait aussi qu’un peu de recul leur ferait du bien à tous les deux. Il déglutit pourtant en l’entendant déclarer qu’elle allait partir en voyage avec Aaliyah, ayant du mal à digérer le fait qu’elle parle de sa fille et non de la leur. Comme s’il avait suffisamment trahi leur famille pour qu’il n’en fasse plus totalement partie. Il sentit son coeur se serrer encore un peu plus et il avait beau sentir qu’elle disait ça avec l’intention évidente de le blesser, il la laissait réussir. Le fait de savoir qu’elle tapait là où ça faisait mal et qu’elle cherche à lui rendre la pareille n’aidait pas du tout à mieux accepter ce qu’elle lui disait. Il ouvrit la bouche pour dire que ce n’était pas vrai, qu’il avait besoin d’elle, mais les mots restèrent coincés au fond de sa gorge. Peut-être qu’il sentait que ça aurait été un mensonge, peut-être que ses mots l’avaient assez secoué pour qu’il n’ait plus envie de tenter de réparer la situation. Le mieux à faire c’était sans doute de la laisser partir et de prier pour qu’elle revienne. Il ne pourrait pas la raisonner, elle ne lui pardonnerait pas maintenant. Tout ce qu’il disait ne faisait qu’ajouter de l’huile sur le feu et il était soudainement trop las pour continuer. « Tu comptes partir longtemps ? » Il aurait voulu lui dire de ne pas partir, que si elle partait c’en était quasiment fini d’eux, que maintenant qu’il avait eu le courage de lui en parler il avait besoin d’elle, il avait besoin qu’elle l’accepte et qu’elle le soutienne au lieu de s’énerver et de se focaliser sur la façon dont il avait trahi sa confiance. A la place il avait posé sa question d’une voix remplie de lassitude, comme s’il avait déjà à moitié abandonné, comme s’il savait que ça ne servirait à rien de se battre. Peut-être qu’au fond il n’avait pas envie de se battre, qu’il n’en avait plus envie. « Laisse-moi lui annoncer avant s’il-te-plaît. » Demanda-t-il avant de s’écarter à nouveau. Il ne retourna pas s’asseoir mais choisit de remettre de la distance entre eux, comme si le fait de se rapprocher d’elle et de se faire rejeter encore lui était devenu insupportable. « Et après fais ce que tu as à faire. » Pour digérer, pour me pardonner. Il ne termina pas sa pensée et alla se réfugier dans la cuisine, ayant une soudaine envie de noyer son chagrin dans l’alcool. Il sortit une bière du frigo et en prit une gorgée avant de s’adosser au comptoir de la cuisine. Il tendit l’oreille pour essayer de savoir si Jade était encore là, ne sachant plus vraiment quelle option serait la meilleure. Il n’avait plus envie de retourner dans le salon, de l’affronter.

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Charlie savait qu’il aurait dû dire quelque chose mais il ne savait plus ce qu’il était censé dire. Il savait ce qu’il avait envie de dire, qu’elle aussi se montrait égoïste à tout ramener à elle et à la façon dont il avait voulu lui cacher sa maladie. Il avait envie de lui dire que sa réaction était la preuve même qu’il avait bien fait de ne pas lui en parler avant ça parce qu’au lieu de se sentir soutenu il avait la sensation qu’elle faisait tout pour l’enfoncer. Il comprenait, bien sûr, qu’elle se sente trahie, qu’elle ait besoin d’espace, mais il ne comprenait pas qu’elle semble plus énervée qu’inquiète, tellement prête à sauter sur la moindre occasion de s’éloigner et de ne plus le voir qu’elle ne semblait même pas vouloir entendre les détails de ce qu’il lui arrivait. Alors il savait ce qu’il voulait dire, oui, mais il savait aussi pertinemment que ça leur aurait fait plus de mal que de bien. Il n’était plus sûr que ça change grand-chose mais cette pensée provoquait plus de lassitude en lui qu’autre chose. Il en avait assez de se battre contre tout et tout le monde alors, oui, il était lâche, tout comme elle était lâche alors au moins en ça ils se méritaient bien. Il s’était réfugié dans la cuisine sans s’attendre à ce que Jade tente de l’y rejoindre et il fut simplement soulagé qu’elle lui ait accordé au moins le droit d’en parler à leur fille avant de partir avec elle. Il entendit ses pas dans l’escalier et sortit une bouteille de whisky d’un des placards de la cuisine avant de se servir et de commencer à le siroter en silence. Il ressentait une sensation de vide l’envahir et il n’avait plus envie d’essayer de la faire disparaître. Il avait la certitude qu’il était déjà trop tard pour ça, qu’il n’y avait rien qu’il aurait pu dire ou faire pour empêcher la catastrophe qui s’était déjà mise en route. « T’es sûr de me faire assez confiance pour me croire sur parole ? » Lâcha-t-il sans prendre la peine de se détacher du comptoir de la cuisine, l’amertume évidente dans sa voix. Il leva les yeux au ciel, se maudissant lui-même de ne pas savoir tenir sa langue, il ne faisait qu’ajouter de l’huile sur le feu et il n’avait aucunement l’intention de repartir dans un débat avec sa femme. Il savait que ça n’aurait servi à rien. Il soupira longuement. « Je t’enverrai un sms. » Concéda-t-il d’un ton las, se demandant si elle n’allait pas tout simplement ignorer son message et demander directement à leur fille ce qu’il avait bien pu lui raconter. Il n’était pas sûr que ça ait encore de l’importance. Une petite partie de lui avait envie de sortir de la cuisine et de la regarder partir, et l’autre n’avait pas envie de voir ça. Il ne savait pas quand elle reviendrait, elle-même ne le savait pas, mais il n’avait pas envie de la revoir quitter la maison à chaque fois qu’il repenserait à elle. Alors il resta caché dans la cuisine, attendant d’entendre la porte de la maison se refermer.