And then I crashed into you [Charlie]

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Charlie avait travaillé près de deux semaines de suite alors il avait décidé – ou plutôt on l’avait forcé – à prendre un peu de repos. Il était donc à la maison pour la journée, soulagé que Jethro n’y soit pas, ne se souciant d’ailleurs pas de savoir où il se trouvait. Il espérait juste qu’il n’était pas avec Aaliyah, même s’il n’y croyait pas vraiment. Son beau-frère n’avait pas manqué une occasion de lui faire comprendre qu’il passait du temps avec sa fille et ses amis depuis l’autre fois et jusqu’à présent Charlie n’avait rien trouvé d’assez incriminant pour aller en parler sérieusement avec Jade. Il ne savait pas s’il devait s’en réjouir ou pas. D’un côté il aurait sauté sur n’importe quelle occasion de le foutre à la porte de chez lui, mais de l’autre il était soulagé de ne voir aucun résultat de l’influence de Jethro sur sa fille. Il espérait juste que ce n’était pas qu’elle était devenue trop forte pour cacher ses secrets. Il avait finalement réussi à s’endormir pour une sieste quand il entendit son téléphone pro sonner. Il grimaça et décrocha, déjà de mauvaise humeur. On le forçait à rentrer chez lui et après on venait le déranger alors qu’il arrivait enfin à se reposer, c’était pas possible ! Il se redressa dans son lit brusquement en entendant parler de son frère ou de son beau-frère – l’infirmière n’avait pas l’air sûre mais à la description qu’elle en faisait Charlie comprit aussitôt qu’il s’agissait bien de Jethro. Elle avait parlé d’un accident de voiture et de quelqu’un qu’il avait ramené à l’hôpital avec ce qui ressemblait à une jambe cassée. Elle ne lui demandait pas particulièrement de venir mais puisqu’elle avait son numéro de téléphone elle avait cru bon de le prévenir. Il se releva aussitôt après avoir raccroché et se rhabilla. Jade était au boulot, il essaya d’appeler sa fille puis sa femme mais aucune des deux ne décrocha. Il avait trop peur que l’accidenté soit Aaliyah pour ne pas prendre la peine d’aller à l’hôpital. Il laissa un message sur le répondeur de sa fille en lui demandant de le rappeler dès qu’elle le pourrait avant de raccrocher et de se mettre en route pour l’hôpital. Il y arriva en un temps record, n’ayant pas eu le moindre bouchon et ayant roulé au-dessus de la vitesse réglementaire, toujours inquiet que ce soit sa fille qui ait été admise. S’il avait pris la peine de réfléchir il se serait douté que si ça avait été le cas l’infirmière le lui aurait dit, mais il était toujours inquiet quand Aaliyah traînait avec Jethro et son cerveau s’était tout de suite dirigé vers la pire option possible. Il débarqua dans l’hôpital en trombe et demanda à l’hôtesse d’accueil directement où se trouvait son beau-frère et la personne qu’il avait accompagnée jusqu’ici. Il la remercia après avoir obtenu sa réponse et se dirigea à l’étage en question. Jethro était assis dans un fauteuil en-dehors de la chambre, ne semblant pas particulièrement blessé. Il avait plutôt l’air aussi blasé que d’habitude. « J’y serai pas si une certaine personne voulait bien arrêter de faire le con. » Répliqua-t-il les dents serrées avant de rentrer dans la chambre. Il fut aussitôt rassurée, ce n’était pas Aaliyah. Il regrettait à présent de s’être déplacé, mais maintenant qu’il était là il pouvait bien venir aux nouvelles au moins. Il connaissait le blessé en question et il savait qu’il était ami avec sa fille. « Je savais pas que t’avais le permis. » Lança-t-il à l’adresse du jeune homme à la jambe cassée qui avait l’air de souffrir le martyre. Son ton était clairement réprobateur, il savait très bien qu’il n’avait pas le permis et le jeune homme le savait aussi. Il semblait trop concentré sur la douleur pour répondre quoique ce soit. « Je reviens. » Lâcha-t-il d’un ton agacé avant de revenir dans l’encadrement de la porte. Il baissa les yeux sur Jethro. « Tu sais où est Aaliyah ? » Il n’était pas d’humeur à y mettre les formes et son ton était sec. Il voulait juste savoir que sa fille n’avait pas été avec eux et n’était pas elle aussi blessée.

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Charlie avait été soulagé de voir que sa fille n’était pas l’accidentée avec la jambe cassée, il était un peu moins soulagé de ne pas savoir où elle était. Il était persuadé qu’elle était sortie avec les personnes qui avaient fini à l’hôpital alors forcément il ne pouvait pas s’empêcher de s’inquiéter. Vu qu’ils étaient à priori assez débiles pour faire de la moto sans le permis, ils étaient aussi sûrement assez débiles pour faire d’autres conneries. Il vérifia son téléphone, toujours pas de nouvelles. Il se serait senti mieux en sachant qu’elle n’était pas en danger, voire même qu’elle avait fini par rentrer à la maison d’elle-même. Il fourra son téléphone dans sa poche de jean, frustré. L’attitude désinvolte de Jethro ne l’aidait définitivement pas à se calmer et il faillit lui répondre qu’elle n’était pas chez eux puisqu’il en venait et que si elle y avait été il n’aurait pas pris la peine de venir jusqu’ici, mais se retint à la dernière seconde, serrant les dents à la place. Peut-être qu’elle était rentrée pendant que lui était en chemin pour Brighton, c’était possible après tout, et il s’efforçait de croire à cette hypothèse. Il préférait la croire tranquillement chez eux plutôt que dehors avec ses débiles d’amis. Jethro paraissait blasé en lui disant que ça aurait pu être elle à la place de l’idiot avec la jambe cassée mais ça ne faisait qu’énerver encore plus Charlie. Il était censé le remercier d’avoir pris sa place et d’avoir risqué sa vie au lieu d’elle ? Il s’attendait à recevoir une médaille peut-être ? La médaille de la connerie, à la limite, Charlie ne pouvait pas la lui refuser. D’un autre côté il savait très bien que sa fille avait toujours voulu monter sur cette foutue moto, donc il ne pouvait pas blâmer Jethro d’avoir essayé de l’y inciter. Pour le coup, ça c’était du Aaliyah tout craché et elle n’avait probablement pas eu besoin de l’influence de son « oncle ». Dommage, ça aurait été beaucoup plus satisfaisant de pouvoir passer ses nerfs sur Jethro pour une raison valable. Cette réalisation le força à se calmer un tout petit peu, même si l’agacement du jeune homme n’aidait définitivement pas. Il se mordit la lèvre, faisant tout pour garder son calme. Il se frotta vigoureusement le visage, essayant à la fois de remettre de l’ordre dans ses idées et de se détendre. « Tu peux essayer de l’appeler s’il-te-plaît ? Elle ne me répond pas, mais peut-être que pour toi elle décrochera. » Il avait soupiré juste après avoir prononcé ces mots, sa fierté en avait pris un coup, mais son inquiétude dépassait tout le reste. Il préférait savoir qu’elle était en sécurité même si ça voulait aussi dire avoir la preuve qu’en ce moment elle préférait Jethro à son propre père. Ce n’était pas comme si ça aurait été une très grande surprise après tout. Il jeta un coup d’oeil à la veste abîmée de Jethro se pencha pour regarder de plus près. Il haussa un sourcil, il n’avait presque rien, à peine une égratignure. « Je m’occuperai de toi après. » Pas pour lui passer un savon, pour désinfecter la plaie et vérifier que ce n’était rien de sérieux. « Pour info, c’est exactement pour ce genre de connerie que je ne voulais pas que tu traînes avec ma fille. » Ne put-il s’empêcher de lancer, sachant très bien qu’il se montrait parfaitement injuste envers lui. Ce n’était pas comme s’il pouvait aller engueuler le blessé qui était encore en train de pleurnicher et qui avait la jambe cassée, ça aurait été cruel. Et il avait envie de passer ses nerfs sur Jethro, tant pis, c’était comme ça. Il soupira à nouveau avant de rentrer encore une fois dans la salle. Le blessé semblait s’être un peu calmé, mais Charlie n’avait ni la patience ni l’envie de faire preuve de douceur à son égard. Il regarda rapidement la fiche sur laquelle les infirmières avaient déjà notées quelques informations. « On va te faire passer une radio. » Dit-il sèchement au moment même où une infirmière rentrait dans la chambre. Il lui fit signe de l’emmener faire la queue en radiologie. « Prévenez-moi quand les résultats seront prêts. » En attendant il ne pouvait pas faire grand-chose. Il sortit à nouveau, se tenant devant Jethro, les bras croisés, attendant de voir s’il avait pu avoir la confirmation qu’Aaliyah allait bien.

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Charlie savait pertinemment qu’il ne se montrait pas vraiment juste envers Jethro, mais c’était plus fort que lui, il s’inquiétait pour sa fille et c’était plus facile de blâmer la personne qu’il imaginait avoir une mauvaise influence sur elle. C’était la cible idéale pour déverser sa frustration, même s’il n’en était pas fier. De toute évidence sa remarque n’avait d’ailleurs pas beaucoup plu à Jethro, mais Charlie n’était pas sûr qu’ils en soient encore à ça près. Ils ne s’étaient presque pas adressé la parole depuis la dernière fois dans la cuisine et très honnêtement le médecin avait fini par se convaincre que ce n’était pas plus mal. Sa vie était presque redevenue tranquille, presque. Parce que bien sûr c’était sans compter sur les accidents de moto débiles. Et sur le fait qu’il se posait encore un million de questions sur ce qu’il avait pu faire avec Jethro. Il revint dans le couloir après avoir envoyé l’ami d’Aaliyah au service de radiologie, ne pouvant s’empêcher de lever les yeux au ciel en l’entendant geindre qu’il avait mal. Il était d’habitude beaucoup plus patient et compréhensif avec les gens qu’il traitait mais il n’avait pas envie de faire d’effort pour un idiot qui aurait pu mettre la vie de sa fille en danger. Il n’avait aucune compassion à lui donner. Il laissa retomber ses bras le long de son corps en entendant Jethro lui annoncer qu’Aaliyah était rentrée à la maison, immédiatement soulagé. Il savait qu’il avait tendance à s’inquiéter souvent pour rien, mais là il pensait vraiment avoir eu une raison suffisante. Il laissa échapper un petit soupir de soulagement et baissa les yeux sur Jethro. Il avait encore l’air énervé, et Charlie pensait savoir pourquoi. Il se mordit la lèvre en l’entendant répliquer, s’efforçant de ne pas répliquer totalement à chaud de peur de l’envoyer chier une nouvelle fois. Il savait que ça ne servirait à rien et il était d’un peu meilleure humeur maintenant qu’il savait que sa fille était hors de danger. Il se força à garder un ton calme en répondant : « Je sais que tu dis ça de manière sarcastique, mais j’aurais bien aimé me reposer pour une fois, figure-toi. » Il aurait du être désolé tiens ! Au lieu de chercher à l’emmerder et à lui faire remarquer encore une fois qu’il bossait trop, Charlie aurait apprécié de vraies excuses ou au moins un peu de sympathie pour l’avoir forcé à venir jusqu’ici le seul jour depuis des semaines où il n’était pas censé y être. Mais ça aurait été trop demandé bien entendu. Il avait parfois du mal à comprendre pourquoi il faisait encore autant d’effort avec Jethro, même si aujourd’hui, il savait que c’était en partie parce qu’il avait lui aussi tort. Ce n’était pas de la faute de son beau-frère, il le savait, et maintenant qu’il savait aussi qu’Aaliyah allait bien c’était plus difficile de l’ignorer. « Je sais que c’était pas ta faute. » Concéda-t-il, avant d’ajouter aussitôt par fierté : « Cette fois-ci. » Il n’avait pas pu s’en empêcher, mais il ne voulait pas non plus que Jethro se fasse des idées, il était capable d’admettre que l’accident serait probablement arrivé qu’il soit là ou pas, il ne voulait pas qu’il pense que ça allait magiquement améliorer l’opinion qu’il avait de lui. Il aurait tout simplement pu admettre qu’il avait tort et en rester là, mais il était trop fier pour ça. Et quand il s’adressait à quelqu’un comme Jethro, quelqu’un qui semblait bondir au moindre signe de faiblesse pour en profiter, c’était devenu comme un mécanisme de défense. « Allez viens, je vais jeter un œil et désinfecter pendant qu’il passe sa radio. » Proposa-t-il en désignant la chambre d’un geste de la main. Il n’allait pas attendre pendant une heure que les résultats de la radio soient prêts, et il tenait malgré lui à s’assurer que ce n’était rien de grave. C’était plus fort que lui, il n’allait pas le laisser souffrir inutilement alors qu’il aurait probablement pu l’aider.

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Charlie savait très bien qu’il pouvait toujours rêver s’il s’attendait à recevoir des excuses sincères de la part de Jethro, mais le voir refuser la perche qu’il lui tendait clairement avec autant de nonchalance l’agaçait quand même. Lui était capable d’admettre qu’il avait eu tort et que ce n’était probablement pas de sa faute, alors pourquoi est-ce que c’était si dur pour lui de s’excuser sincèrement de l’avoir inquiété et de l’avoir fait venir jusqu’à l’hôpital ? Même s’il n’y était pour rien, c’était ce qu’on appelait être poli, non pas que ce soit tellement le genre de Jethro. Il avait parfois envie de lui faire la leçon là-dessus, puis il se rappelait qu’il n’était pas son père, très loin de là même, et il choisissait de se taire. De toute façon il était irrécupérable, non ? Il ne semblait toujours pas prêt à prendre sur lui et à ravaler sa fierté en tout cas. Mais Charlie devait bien admettre qu’il était surpris de le voir se calmer. Apparemment il l’avait plus vexé qu’il ne l’aurait cru en l’engueulant pour quelque chose qui n’était pas de sa faute, et son admission avait suffi à le faire redescendre au moins un peu. Charlie préférait ça, il passait déjà une assez mauvaise journée sans avoir besoin d’écouter Jethro se plaindre et lui cracher du venir à la figure pendant qu’il le soignait. Sans compter que Jethro avait beau faire le fier, il grimaçait quand même en essayant de bouger le bras, c’était bien le signe qu’il avait mal. Il n’avait pas envie de le voir se débattre alors qu’il tentait de l’aider, encore une fois, il n’était pas d’humeur. Il le laissa passer devant lui et pénétrer dans la chambre d’hôpital avant de le suivre et de refermer la porte derrière. Il n’aimait pas particulièrement être dérangé et pour être parfaitement honnête il avait un peu peur que Jethro ne fasse une blague ou une réflexion compromettante et que quelqu’un l’entende en passant innocemment dans le couloir. S’il n’en parlait pas à Jade ce n’était pas pour que ça arrive aux oreilles de ses collègues ! Il leva les yeux au ciel en entendant la réplique de son beau-frère, mais il était plus amusé qu’autre chose. C’était tout de suite moins désagréable quand Jethro ne se braquait pas complètement. « Et moi je pensais pas que tu étais sensible à ce point. » Rétorqua-t-il, son ton clairement moqueur. Il n’avait pas eu l’idée de le faire souffrir inutilement mais maintenant que Jethro en parlait… Non, il chassa cette idée de sa tête, il était assez désagréable quand il n’avait pas mal, Charlie n’avait pas envie de voir ce que ça donnerait s’il en rajoutait. Et puis ça n’aurait pas été très professionnel, ça l’aurait probablement trop déçu. Il alla chercher une compresse et du désinfectant, tournant momentanément le dos à son beau-frère. « Tu sais, maintenant que je suis là… Et je n’allais pas te laisser attendre alors que j’ai du temps pour m'occuper de toi. » Expliqua-t-il avant de revenir vers Jethro, les bons outils à la main. Il imbiba une des compresses de désinfectant avant d’ajouter, comme pour se défendre, comme par peur que Jethro pense qu’il le faisait par gentillesse envers lui, comme si c’était un signe de faiblesse : « Jade et Aaliyah m’en auraient trop voulu. » Il n’était même pas sûr que ce soit vrai, mais c’était vrai qu’il n’avait pas tellement envie de prendre le risque. Il commençait à croire que toute sa famille était sous le charme de Jethro et il avait peur de la crise que sa fille serait capable de piquer si elle apprenait qu’il n’était pas venu en aide à son béguin du moment. Non pas que ce genre de considération pesait généralement lourd sur ses décisions, la preuve il ne traitait pas son ami accidenté avec particulièrement de douceur, mais ça, Jethro n’était pas obligé de le savoir. « Attention, ça risque de piquer, essaye de retenir tes larmes. » Prévint-il, un sourire moqueur au coin des lèvres, après tout Jethro avait l’air sensible. Il commença à désinfecter la plaie de son beau-frère, y allant doucement malgré l’amusement dans sa voix. Il avait attrapé gentiment le poignet de Jethro de sa main gauche pour s’assurer qu’il ne bougerait pas et avait commencé à tamponner la plaie avec la compresse.

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Charlie avait cru lire de la déception dans la voix de Jethro quand il s’était corrigé et avait ajouté qu’il était juste venu s’occuper de lui pour ne pas se faire engueuler par Jade et Aaliyah. Il regrettait soudainement presque d’avoir menti, ce n’était pas comme si ça lui faisait plaisir de le vexer après tout. Il avait juste pensé que ça lui aurait fait trop plaisir de savoir qu’il n’en avait pas strictement rien à foutre, et l’idée lui avait été insupportable. Maintenant il se sentait con, mais pas assez pour revenir sur ce qu’il avait dit. C’était fait, c’était fait. Et l’attitude de Jethro face à la douleur le faisait sourire malgré lui, une vraie chochotte, de quoi lui changer les idées. Il savait que ce n’était jamais agréable comme sensation le désinfectant sur une plaie ouverte, mais il se serait attendu à ce que Jethro soit trop fier pour montrer quoique ce soit. A priori il avait l’air d’assumer son côté sensible, Charlie trouvait ça attachant. Il fut une nouvelle fois frappé par la même pensée que la dernière fois : il aurait presque pu l’apprécier s’il n’avait pas été aussi chiant. Au fond, il réussissait même à l’apprécier malgré ça, juste un peu, juste assez pour ne pas avoir constamment envie de l’étrangler. Assez en tout cas pour prendre le temps de le soigner alors qu’il aurait très bien pu demander à un collègue de s’en charger et aller reprendre sa sieste en salle de repos. Il laissa échapper un soupir amusé, trop concentré sur ce qu’il faisait pour regarder Jethro. « T’as raison, ça m’amuse de voir souffrir les gens, c’est pour ça que j’ai choisi de faire médecine. » Répondit-il de manière ironique, mais son ton était une nouvelle fois plus moqueur qu’autre chose. Maintenant qu’il savait qu’Aaliyah allait bien, la colère était passée, et le fait que Jethro semble moins enclin à lui causer des problèmes l’aidait aussi à rester calme pour une fois. Il se retint de préciser que s’il avait vraiment voulu voir les gens souffrir, il serait devenu dentiste, préférant se concentrer sur la plaie de Jethro. « Ou peut-être que c’est la première étape de mon plan diabolique pour me débarrasser de toi, qui sait ? » Répliqua-t-il, un petit sourire malicieux au coin des lèvres malgré lui. « Je fais semblant de t’apprécier pour qu’on ne me suspecte pas de ton meurtre plus tard. » Il haussa légèrement les épaules, comme pour feindre l’indifférence et jouer les innocents, avant de retirer la compresse du bras de Jethro et de la jeter à la poubelle. Il s’écarta à nouveau pour aller chercher un bandage. Ce n’était vraiment pas grand-chose mais ça éviterait que ça ne s’infecte. Vu comment Jethro semblait sensible à la douleur, il devrait le remercier. Il pouvait sentir le regard de son beau-frère sur lui et il décida de se concentrer sur ce qu’il faisait plutôt que de chercher à le soutenir. Il était soudainement très conscient du fait qu’ils étaient tous les deux seuls dans la pièce et de ce qu’il s’était passé la dernière fois qu’ils s’étaient retrouvés dans une situation similaire. Il ne voulait pas y penser, et il ne voulait surtout pas que Jethro y pense. « Essaye de ne pas bouger. » Demanda-t-il, évitant toujours soigneusement le regard du jeune homme. Pour une fois il n’était pas particulièrement mal à l’aise, il préférait juste éviter de tenter le diable. Il commença à enrouler le bandage autour du bras de Jethro, juste pour éviter les contacts et les éventuelles infections, prenant soin de ne pas appuyer plus que nécessaire pour ne pas lui faire mal. « Tu voudras attendre ton ami ? Je peux vous ramener quand j’aurais fini avec lui. Sinon tu peux essayer d’appeler ta sœur pour qu’elle passe te chercher. » Proposa-t-il en continuant à enrouler le bandage, bien conscient du fait que Jethro devait être fatigué, il avait beau faire le fier, ce n’était jamais plaisant ou rassurant d’avoir un accident et de finir à l’hôpital. Sans compter qu’il venait de réaliser que plus longtemps Jethro restait à l’hôpital, plus il avait de chance d’apprendre qu’il était malade. Et plus il y avait de chance que ses collègues apprennent… Ce qu’il se passait avec lui.

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Ça faisait plaisir à Charlie de le faire rire, quelque part ça le rendait même assez fier. C’était flatteur de réussir à provoquer ce genre de réaction chez lui qui semblait blasé 99 % du temps et le médecin ne pouvait pas s’empêcher de trouver ça adorable, même s’il aurait préféré s’amputer une des deux jambes lui-même plutôt que de l’admettre. Il était bien trop fier pour ça, et il savait très bien que Jethro ne l’aurait pas lâché avec ça s’il osait l’avouer à voix haute. Et n’était-ce pas beaucoup plus simple et agréable de discuter juste comme ça ? Sans s’engueuler, sans Jethro qui cherchait constamment à le faire sortir de ses gonds ou à le faire craquer ? C’était reposant, et ça lui changeait. Alors oui, il aimait bien faire semblant d’être en train de planifier secrètement l’assassinat de Jethro et il aimait que son beau-frère rentre dans son jeu, ça le faisait sourire et ça détendait l’atmosphère, c’était assez rare entre eux pour être savouré. Il ne s’était pas attendu à ce que Jethro soit capable de rester en place plus de deux minutes donc il ne fut pas étonné de le voir gigoter dès qu’il s’était éloigné, ce qui l’étonna en revanche, ce fut plutôt que le jeune homme décide de s’excuser. Ce n’était pas grand-chose mais ce n’était pas la première fois qu’il avait été dans une situation où il aurait pu ou du s’excuser et généralement c’était la croix et la bannière pour lui arracher ne serait-ce qu’un « désolé ». S’il oubliait le léger accident de moto, Charlie était presque prêt à dire que c’était la journée des bonnes surprises. Et Jethro en rajouta d’ailleurs une nouvelle en affirmant qu’il n’était pas ami avec l’idiot qui avait décidé de faire de la moto sans permis et surtout sans savoir en faire. Il n’avait peut-être pas si mauvais goût que ça, même si Charlie n’approuvait pas forcément l’idée de Jethro de le laisser se démerder pour rentrer. Après, l’infirmière avait du aussi appeler ses parents et ils étaient probablement en route, ils étaient même peut-être déjà arrivés. Il lui proposerait de le déposer si jamais ses parents n’avaient pas pu venir, il les connaissait bien et ils habitaient pas très loin de chez lui, ça ne lui coûterait rien. Sans compter que vu la façon dont il avait été incapable de se contrôler la dernière fois qu’il s’était retrouvé seul avec Jethro dans sa voiture, il ne dirait pas non à quelqu’un pour faire buffer et empêcher tout dérapage potentiel. « Je me doutais que tu n’avais pas demandé à ce que je vienne, j’ai supposé que tu ne voudrais pas que je t’engueule. » Expliqua-t-il un peu plus sobrement après avoir terminé de refermer le bandage, haussant les épaules, essayant toujours de ne pas croiser le regard de Jethro sans en avoir l’air. « Tu peux m’attendre si tu veux, mais je vais quand même finir de m’occuper de Matt, et je le déposerai sur le chemin du retour si ses parents n’ont pas pu venir. » Ajouta-t-il, lui il ne savait pas s’il avait intérêt à le faire monter dans sa voiture pour bien d’autres raisons. Il commençait à se méfier malgré lui, oui c’était agréable de pouvoir discuter sans crier ou s’insulter avec Jethro, mais la dernière fois qu’ils avaient réussi à faire ça il avait fini par… Comment l’avait formulé Jethro déjà ? Ah oui, par vouloir « le baiser sur le comptoir de la cuisine ». Ces mots étaient restés gravés dans la mémoire de Charlie malgré lui et il ne tenait pas particulièrement à redonner l’occasion à son beau-frère de les remettre dans une situation pareille. « J’ai fini, tu veux aller attendre dans la salle d’atten... » Il fut interrompu par quelqu’un qui frappait à la porte. Il n’eut pas le temps de dire « entrez » que la porte s’ouvrait déjà et qu’il se retrouvait face à sa fille. Il haussa un sourcil, pour le moins surpris. « Qu’est-ce tu fais là ? » Elle n’avait pas le permis, sa mère ne semblait pas être avec elle – elle devait encore être au travail de toute façon – et ce n’était pas comme si elle avait pu marcher jusqu’à Brighton. Il vérifia son téléphone et lu la notification sur son compte uber. Il l’avait installé sur le téléphone de sa fille en cas d’urgence, ce qui était très loin d’être le cas et il leva les yeux au ciel, agacé. Mais Aaliyah ignora complètement sa question, se rapprochant aussitôt du lit où était assis Jethro. « Ça va ? Tu me répondais pas alors j’ai décidé de venir, j’étais inquiète. » Elle n’avait même pas l’air énervée d’avoir visiblement fait le chemin pour rien. Pourquoi l’aurait-elle été, ce n’était pas comme si c’était elle qui allait payer la course.

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Charlie aurait aimé faire comprendre à Jethro qu’entre avoir quelqu’un qui gémissait de douleur pour un motif valable – une jambe cassée ce n’était quand même pas rien – ou se retrouver seul avec lui dans une voiture où il risquait sûrement de profiter de l’occasion pour recommencer ses sous-entendus et essayer de le draguer, le choix était vite fait. A la place il décida de l’envoyer attendre dans la salle d’attente, jusqu’à ce que sa fille rentre dans la chambre bien entendu. L’attitude de cette dernière l’agaçait et il avait vraiment peur de se demander pourquoi. C’était une ado, par définition elle n’était pas censée être facile à vivre, et elle ne l’était clairement pas en temps normal, il s’énervait quand elle faisait des conneries, genre rentrer trop tard ou utiliser son compte uber ou sa carte bleue pour des trucs stupides, mais ce n’était pas ça qui le mettait sur les nerfs en ce moment. Non, c’était sa relation avec Jethro, et il avait peur de se demander si c’était parce qu’il n’avait pas envie qu’elle s’attache à lui et qu’il la fasse souffrir, par peur qu’il ne déteigne sur elle ou pour une autre raison qu’il refusait catégoriquement d’envisager. Dans tous les cas il avait envie d’intervenir dès qu’elle se rapprochait de lui, sauf que bien sûr, il n’avait pas franchement le droit de la ramener. Il se sentit immédiatement coupable en entendant la façon froide dont Jethro lui avait répondu, coupable parce qu’au fond ça ne lui avait pas déplu. Il s’était fait des films sur la façon dont ces deux là avaient pu se rapprocher depuis l’autre fois et ça le rassurait de voir qu’ils n’avaient pas l’air de s’entendre si bien que ça. Il savait que ça ne faisait probablement pas de lui le père du siècle, mais c’était comme ça, et ce n’était pas comme s’il pouvait contrôler ce genre de sentiments. Ils s’imposaient à lui sans qu’il ait son mot à dire. Il se força à faire un pas en arrière, voulant les laisser discuter tranquillement, sans leur donner l’impression d’espionner leur conversation. Ce n’était qu’une façade bien sûr, il n’aurait pas été capable de rater le moindre mot qui se prononçait entre eux, même s’il l’avait voulu, la chambre n’était pas si grande que ça. Toujours était-il qu’il avait croisé les bras sur la poitrine et faisait désormais semblant de ne pas entendre. Il se trahit pourtant en affichant un petit sourire en coin à la réflexion de Jethro, il ne l’avait pas fait à contrecœur, mais si c’était vraiment ce que son beau-frère pensait il ne voyait pas d’intérêt à le contredire. Après tout, ça l’arrangeait non ? Il sentit le regard de sa fille se poser sur lui quand Jethro poursuivit, l’air incrédule de comprendre que cette histoire de moto risquait de lui retomber dessus. « On en parlera ce soir avec ta mère. » Se contenta-t-il d’ajouter, ayant totalement retrouvé son sérieux depuis tout à l’heure. Ils en avaient déjà discuté calmement avec elle, ils avaient essayé de lui expliquer qu’elle avait l’interdiction de monter sur ces engins, mais de toute évidence ça n’avait pas suffi. Il verrait en rentrant comment ils voulaient gérer ça avec Jade, ce n’était pas son genre de prendre des décisions sur leur fille sans la consulter, notamment parce qu’elle avait tendance à être un peu plus laxiste et qu’après c’était lui qui se faisait engueuler pour avoir été trop sévère. « Mais j’ai... » « Ce soir. » La coupa-t-il, n’ayant aucune envie de poursuivre le sujet, et encore moins devant Jethro. Il se serait sûrement fait un malin plaisir de le contredire et d’essayer de détruire ses arguments au fur et à mesure. Non, définitivement pas une bonne idée. Aaliyah fit la moue mais elle n’insista pas, elle connaissait bien ce ton chez son père et contrairement à Jethro elle avait appris à ne pas discuter quand il l’employait. Elle lui lança par contre un regard qui en disait long, de toute évidence sa présence gênait. Il ne savait pas exactement si elle avait quelque chose à dire à Jethro ou si elle voulait juste passer un moment en tête – rien que l’expression donnait la nausée à Charlie – mais il n’était pas le bienvenu. C’était le pompon. « Allez m’attendre en salle d’attente. » Répéta-t-il, incluant cette fois-ci sa fille. « Matt ne devrait pas tarder à revenir de la radiologie et on pourra rentrer quand j’aurais fini avec lui. » Expliqua-t-il, plus pour le bénéfice d’Aaliyah que de Jethro, lui savait déjà tout ça. Sa fille avait déjà rouvert la porte et avait un pied dans le couloir quand elle sembla se rappeler de l’existence de Matt. « Il va bien ? Rien de grave alors ? » Charlie haussa les épaules, ne pouvant s’empêcher de voir à quel point sa fille pouvait être une mauvaise menteuse. Elle ne se souciait en aucun cas de l’état de Matt, c’était évident. « Jambe cassée à priori, ça aurait pu être pire. » Aaliyah acquiesça avant de sortir pour de bon et Charlie se tourna finalement vers Jethro rapidement. « Ça ne devrait pas être long. » Il ne savait pas lui-même s’il lui avait dit ça pour le rassurer qu’ils pourraient bientôt décoller ou pour le mettre en garde qu’il serait bientôt de retour pour jeter un œil sur eux. Il fit un signe à l’hôtesse d’accueil, comme pour lui demander de veiller sur eux pendant qu’il s’occupait de Matt, qu’il voyait d’ailleurs revenir en fauteuil roulant du service radiologie. Parfait, il allait pouvoir plier cette affaire rapidement et rentrer chez lui dormir. Ne restait plus qu’à espérer qu’aucun médecin ne viendrait discuter avec sa fille ou Jethro et surtout que son médecin traitant ne ferait pas de gaffe sur son cancer devant eux. Oui, il allait définitivement faire vite.