Fickle heart, fickle mind [Charlie]

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Charlie se sentait bêtement fier d’avoir réussi à surprendre Jethro. Il en aurait dû s’en contrefoutre mais c’était plus fort que lui, ça lui faisait plaisir. Il avait vraiment fini par le vexer à le traiter de coincé toutes les deux minutes et peut-être que son beau-frère allait finir par comprendre que ce n’était pas le cas. Ou du moins pas complètement. Lui aussi était capable de s’amuser, il ne pouvait juste plus le faire autant qu’il l’aurait voulu. En revanche quand il lui réclama des preuves, Charlie commença à avoir peur. Quel genre de preuves ? Heureusement il ne semblait pas avoir grand-chose de très spécifique en tête, il devait probablement juste vouloir l’inciter à boire encore un peu plus. Très franchement Charlie ne savait pas s’il avait besoin qu’on l’y pousse. Dans sa tête, il avait abandonné l’idée de se battre et de rester sobre dès le moment où il avait fini la moitié de sa première pinte cul-sec. Enfin il allait tout de même essayer de ne pas se mettre une énorme mine non plus, il avait déjà des nausées assez couramment comme ça sans y mêler une mauvaise gueule de bois. « Ah bon ? C’est pas ce que j’avais cru comprendre. » Répliqua-t-il avant d’avoir réfléchi quand Jethro déclara ne pas être un homme facile. Il se mordilla la lèvre, regrettant aussitôt de ne pas avoir tenu sa langue. Son beau-frère faisait des assez de sous-entendus comme ça sans qu’il ne l’y encourage. Après peut-être était-ce la bière qui parlait, mais ça le mettait moins mal à l’aise, ça aurait presque pu le faire rire. Il n’en était pas encore là, il lui manquait encore une bière ou deux probablement. Il détourna quand même les yeux, ne voulant pas l’encourager s’il pouvait s’en empêcher, et termina tranquillement sa deuxième bière. Le problème, c’était qu’ils n’étaient pas synchronisés, s’ils ne finissaient jamais leurs verres en même temps ils allaient toujours se sentir obligés de recommander. Oui, c’était ça le problème ! Il fut interrompu dans ses pensées par la voix de Jethro, lui demandant ce qu’il avait fait de si amusant que ça étant jeune. Ça remontait à tellement loin tout ça… « Merci, je préfère ! » Déjà il n’était pas vieux, il était juste moins jeune, il y avait du progrès. Il se tourna à nouveau vers le barman, pesant le pour et le contre. Il se connaissait assez bien pour savoir qu’il avait dépassé le moment où il était encore capable de prendre des décisions parfaitement sensés et raisonnables mais il hésitait quand même. Il allait bien falloir qu’il conduise pour les ramener, sans compter qu’il n’avait pas prévu de vomir ce soir s’il pouvait y échapper. D’un autre côté il n’aurait pas tous les jours des opportunités comme ça, et il risquait déjà de se faire engueuler en rentrant. Le dilemme était dur mais il avait du regarder le barman trop longtemps puisque celui-ci s’approcha et lui demanda s’il voulait une autre pinte. « Non merci. » Répondit-il, avant d’ajouter « Je vais vous prendre un whisky. » Il se promis mentalement que c’était la dernière fois qu’il commandait et se tourna vers Jethro. « C’est le dernier verre. » Répéta-t-il pour son bénéfice, comme s’il comptait sur lui pour le forcer à être raisonnable. Si c’était le cas il n’y avait pas beaucoup de chance pour que ça marche. Il se remit à réfléchir, cherchant dans ses souvenirs de sa jeunesse. Il buvait bien plus de deux bières assez régulièrement au pub avec des amis pendant qu’ils regardaient la premier league, mais jamais assez pour faire des trucs « amusants ». En tout cas pas au sens où Jethro l’entendait. « Une fois au lycée avec des amis on s’est perdu en rentrant de soirée à pied. On a atterri dans un champ de maïs en cherchant un raccourci et comme on avait pas mangé on a eu l’idée de se servir. On a fini par se faire pourchasser par le propriétaire, il avait sorti sa fourche et tout. Le problème c’est qu’ici tout le monde se connaît, il a reconnu certains de mes potes et on s’est fait engueuler par nos parents le lendemain. » Il n’avait pas pu s’empêcher de rigoler un peu en racontant cette histoire, il n’y avait pas repensé depuis des années. Il avait même oublié qu’il avait un jour été capable de ça. Il se souvenait encore du savon que ses parents lui avaient passé. Malgré tous les ennuis que cette soirée avait pu lui causer, il en gardait de bons souvenirs. Peut-être que Jethro avait raison au fond. « Ca doit te paraître nul comme histoire. » Il lança un petit sourire en coin à Jethro, certain que son beau-frère en avait de beaucoup plus intéressantes. Comparé à lui, même ses histoires les plus folles devaient être ennuyeuses.

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Charlie leva les yeux ciel en l’entendant répondre. Il n’avait pas réellement cru pouvoir compter sur Jethro pour le forcer à se calmer sur l’alcool mais il était quand même un peu déçu. Peut-être parce que maintenant il était certain que ça allait mal finir. Et puis au fond qu’est-ce que ça pouvait bien faire ? Il avait bien le droit à une soirée où il se mettait minable une fois fois tous les quinze ans non ? C’était pas tant demander que ça, si ? Il se força à faire taire la petite voix dans sa tête qui lui rappelait que s’il ne sortait pas en ce moment ce n’était pas pour ne pas s’attirer de reproches de la part de Jade mais bel et bien à cause de son état de santé. Ce soir il n’avait pas envie d’y penser. Il n’en pouvait plus d’y penser, tous les jours, toutes les heures. Il vivait quasiment à l’hôpital, entouré de malades et maintenant il en faisait partie. Il ne supportait plus ça. Il voulait oublier, le temps d’une soirée au moins, qu’il allait devoir continuer son traitement et se faire opérer, qu’il risquait de mourir. Il faisait totalement confiance au collègue qui le suivait mais il connaissait aussi les risques. Il but une gorgée de whisky pour se changer les idées. Il allait y aller beaucoup plus doucement sur ce verre là, sentant déjà les effets de l’alcool sur sa capacité de réflexion. Ça plus la fatigue faisaient qu’il se sentait perdre le contrôle. Et quelque part ça lui faisait plaisir. Il détourna le regard en voyant que son histoire faisait rire Jethro. Il ne s’était pas attendu à particulièrement l’impressionner mais il aurait aimé qu’il fasse preuve d’un peu plus de tact. Il se sentait pathétique de ne pas avoir réussi à trouver une meilleure histoire à lui raconter, de ne pas en avoir vécu de meilleure surtout. Enfin au moins il l’avait fait sourire, c’était mieux que rien. Mignon? Il ne put s’empêcher de rougir légèrement et il porta à son nouveau son verre à ses lèvres pour tenter de camoufler son embarras passager. « Je suis pas vieux. » Protesta-t-il, faute de trouver mieux à redire sur les moqueries de Jethro, mais le coeur n’y était pas vraiment. Au fond, ça le faisait rire de le voir se marrer comme ça, et il commençait presque à trouver ça agréable de le voir se payer sa tête. Presque. Quelques secondes plus tard par contre ce fut à son tour de manquer de s’étouffer sur son verre et il reposa ce dernier sur le bar avant de toussoter rapidement. Il n’y avait pas à dire Jethro avait le don pour lui sortir des trucs le mettant mal à l’aise. Il avait cru que l’alcool suffirait pour le protéger de ce genre de sentiment mais de toute évidence ce n’était pas le cas et la façon qu’avait Jethro de le regarder n’arrangeait rien. Il pouvait presque lire dans ses pensées rien qu’au regard qu’il lui lançait, et clairement il ne pensait pas à une balade « innocente » dans les buissons. Si ça existait d’ailleurs. « Il faut que tu arrêtes de dire ce genre de trucs. » Déclara-t-il, décidant de se montrer parfaitement sincère. L’alcool semblait lui donner du courage et si ce n’était pas l’occasion pour lui en parler alors il ne savait pas quand elle se présenterait à nouveau. Son ton, pourtant, était loin d'être réprobateur. Au contraire, il avait presque dit ça timidement. Il se força à croiser à nouveau le regard de son beau-frère, se demandant à quel point il pouvait se montrer candide avec lui. Avait-il encore quelque chose à perdre ? Il n’en savait rien, très franchement. « Je sais pas si tu fais ça pour t’amuser ou quoi mais... » Il haussa les épaules, ne sachant pas trop comment lui expliquer pourquoi au juste il fallait qu’il arrête. En soit il ne faisait rien de mal, et lui dire que ça le mettait mal à l’aise n’allait que l’encourager à continuer. Mais il ne se sentait pas le coeur de mentir, même s’il savait que ça risquait de lui desservir par la suite. « Mais c’est pas correct. » Termina-t-il, ne trouvant pas de meilleur terme pour expliquer ce qu’il voulait dire. Il reprit une gorgée de whisky, se sentant tout à coup particulièrement stupide. Il s’était probablement fait des films depuis le début et c’était juste la façon dont Jethro s’exprimait avec tout le monde, et il allait encore passer pour le coincé de service à lui faire une réflexion.

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Charlie avait presque aussitôt regretté d’avoir lancé le sujet, s’attendant à tout moment à ce que Jethro se moque de lui et lui reproche de se faire des idées. Il le traitait déjà de coincé, il ne manquait plus qu’il le traite de pervers en plus. Mais bien entendu, son beau-frère ne réagit pas comme ça et il en rajouta une couche à la place, essayant de le déstabiliser. Quelque part Charlie était soulagé, il ne niait pas, il ne faisait pas semblant de rien, et peut-être que s’ils en parlaient ils pourraient crever l’abcès, peut-être même que Charlie pourrait réussir à lui faire entendre raison ! Ok, là il savait très bien qu’il rêvait éveillé, mais peut-être que le fait d’avoir amené le sujet sur le tapis allait forcer Jethro à se calmer un peu sur les sous-entendus. Au moins un peu, même si pour l’instant le médecin devait bien avouer que ça n’avait pas l’air de marcher. Ça avait même plutôt l’air d’empirer encore les choses. Comme à chaque fois qu’il choisissait d’ouvrir sa gueule en somme, rien de bien surprenant au moins. Il soupira en l’entendant lui reprocher – une fois n’est pas coutume – d’être coincé. Ça n’avait rien à voir, et au fond il pensait que Jethro le savait aussi. Il faisait preuve de mauvaise foi, il avait au moins ça en commun avec sa grande sœur tiens. Il reprit une gorgée de whisky au lieu de répliquer, cherchant à collecter un peu ses pensées avant de se risquer à dire quoique ce soit. Jusqu’à présent Jethro ne s’était pas montré très clément et il savait que s’il disait le moindre truc de travers ça risquait de lui retomber dessus. Il se tendit malgré lui en le voyant se rapprocher, par pur réflexe, sans trop comprendre pourquoi. Il avait peur de quoi au juste ? Il n’en savait rien, mais c’était comme un réflexe de survie. Ce qu’il savait en tout cas c’était que le regard de Jethro ne lui disait rien qui vaille, et ne lui permettait pas de se sentir beaucoup plus à l’aise que tout à l’heure. Dans quoi il s’était lancé ? Au final il avait peut-être eu raison d’ignorer ses sous-entendus jusqu’à présent. Il ouvrit la bouche pour se défendre en entendant ses accusations, mais aucun son n’en sortit. C’était vraiment là-dessus qu’il comptait l’attaquer ? Son premier réflexe avait été de répliquer qu’il avait plein d’amis gay mais heureusement il s’en empêcha au dernier moment, sachant très bien que c’était une justification merdique et sans la moindre valeur. « C’est pas du tout ça ! Je réagirais pareil si j’étais une femme. Ou si t’étais une femme. Ou si j’étais bisexuel. » Se rattrapa-t-il en se rendant compte que la situation hypothétique était plus logique dans ce sens là. Il s’emmêlait les pinceaux, le regard de Jethro le déstabilisait. Toute l’attitude de son beau-frère le déstabilisait en fait, et le fait qu’il se soit rapproché n’aidait pas. « C’est pas correct parce que je suis marié. » Explicita-t-il, puisque apparemment ce n’était pas évident aux yeux de Jethro. « Parce que je suis marié à ta sœur ! » S’exclama-t-il aussitôt après, comme s’il avait trouvé l’argument qui était sur de faire mouche, le mouvement qui lui garantirait l’échec et mat. Il regarda autour d’eux, se rendant soudainement compte qu’il aurait peut-être du baisser un peu sa voix au lieu de parler comme s’ils étaient seuls au monde. Par chance les autres clients ne semblaient pas particulièrement s’intéresser à leur conversation. Il reprit une gorgée et se rendit compte que son verre était à présent vide. Merde. Il le garda à la main et commença à jouer nerveusement avec, ses yeux toujours tournés vers Jethro. « Je ne pense pas que je sois coincé parce que je n’ai pas envie de me faire draguer par mon beau-frère. Ça me paraît raisonnable comme réaction. » Il se força à soutenir le regard de Jethro, comme si ça allait donner du poids à ses arguments. L’alcool commençait définitivement à faire effet. « Peut-être qu’on devrait y aller. » Proposa-t-il, ne s’attendant pas une seule seconde à ce que Jethro accepte.

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Au moins son inconfort semblait amuser Jethro, c’était probablement mieux plutôt que ça l’énerve. Remarque, il avait l’air de bien trop bonne humeur pour encore réussir à s’énerver. Un peu comme Charlie en somme. N’empêche qu’il aurait aimé que ses arguments aient un peu plus d’efficacité pour calmer son beau-frère, il aurait aimé être pris au sérieux, mais non bien sûr Jethro cessait de l’écouter dès qu’il entendait les mots « correct » ou « raisonnable ». Tout comme sa proposition de rentrer, elle était tombée dans l’oreille d’un sourd, mais au moins là c’était sans grosse surprise. Charlie n’y avait pas cru lui-même en le disant, mais il devait bien essayer de rester raisonnable pour eux deux puisque Jethro en semblait incapable. Parce que le jeune homme au lieu de se calmer ne faisait qu’empirer les choses et Charlie se mordilla la lèvre en l’entendant poursuivre. Il n’avait pas envie de s’imaginer en train de se faire draguer par un autre mec de la salle, tout comme il n’avait pas envie d’imaginer comment il serait capable de réagir si Jethro n’était pas son beau-frère. Ça ne servait à rien, ce n’était pas le cas, sans compter qu’il n’en savait rien. Comment est-ce qu’il était censé deviner ? Ça dépendait de trop de facteurs différents. Il se tendit brutalement en voyant Jethro descendre de son tabouret et se rapprocher encore plus de lui. Il savait qu’il le faisait justement parce qu’il savait que ça le mettrait mal à l’aise, mais ça ne l’empêchait pas de réagir exactement comme il l’avait attendu. C’était plus fort que lui, un mécanisme de défense. Il voyait bien dans le regard de Jethro à quel point ce petit jeu l’amusait, tout l’inverse de Charlie. Il récupéra son verre et reprit une gorgée de whisky. Tiens, il ne l’avait pas fini tout à l’heure ? Quand est-ce qu’il avait recommandé ? Il ne s’en souvenait pas, ce n’était pas franchement bon signe. Il avait été trop obnubilé par Jethro pour se rendre compte qu’il lui avait recommandé la même chose. « C’est pas une question d’égo. » Tenta-t-il de se défendre, essayant de reprendre contenance. Mais sa voix n’était plus aussi ferme que tout à l’heure. C’était dur de répliquer quoique ce soit avec les yeux de Jethro plantés sur lui comme ça. Il resserra sa prise sur son verre sans s’en rendre compte, comme s’il essayait de se redonner du courage. Qu’est-ce qu’il lui arrivait au juste ? « Je sais pas. » Lâcha-t-il, un peu trop honnêtement à son goût. Il aurait simplement pu dire non et l’affaire aurait été pliée – quoique connaissant Jethro probablement pas – mais il n’avait pas réussi à mentir. Ça lui était arrivé au fil des années de se faire draguer par d’autres femmes et il avait toujours réagi au cas par cas, choisissant généralement l’option qui lui demandait le moins d’effort et qui le mettait le moins mal à l’aise. Mais s’il s’était déjà fait draguer par un autre homme il ne s’en était en tout cas pas rendu compte, et il n’était pas dans un état propice à la réflexion. « Mais ça dépend de ce que tu entends par laisser faire je suppose. En tout cas j’en aurais pas plus ou moins envie. » Se défendit-il, sa voix retrouvant un peu de son assurance. A l’aide du whisky peut-être. Il en reprit d’ailleurs un peu, commençant à comprendre que cette soirée ne pouvait que mal finir. « Je vois pas pourquoi ça t’intéresse, et je vois pas ce que ça peut bien faire. Aux dernières tu n’es pas juste un type qui vient m’aborder comme tu dis. » Il aurait dû essayer de le ramener à la réalité plus tôt au lieu de rentrer dans son jeu, mais il y avait été poussé par une curiosité malsaine. Une petite partie de lui avait envie de voir où Jethro voulait en venir et jusqu’où il serait capable d’aller.

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Charlie était en train de merder, et le pire, c’était qu’il le savait pertinemment. Il avait fait une connerie en rentrant dans ce bar et depuis ce moment là il ne faisait que faire empirer les choses. Il avait beau commencer à ressentir les effets de l’alcool il ne pouvait pas manquer l’amusement dans les yeux de Jethro. Il semblait prendre un malin plaisir à jouer avec lui et en ça, la situation ne différait pas de d’habitude. Excepté que là il se laissait presque faire. Il était fatigué, il n’avait pas envie de rentrer, il n’avait plus envie de se battre, mais il n’avait pas non plus envie de faire quelque chose qu’il allait amèrement regretter une fois sobre. Et là, il sentait que ça commençait à en prendre doucement la tournure. Il se connaissait assez pour savoir que quand il commençait à être honnête comme ça il n’était capable de rien de bon, et avec Jethro aux commandes de leur conversation ? Il courait à la catastrophe. Il leva les yeux au ciel en l’entendant dire que ça n’aurait pas dû être si compliqué que ça d’oublier qui il était. « Tu plaisantes ? T’es tellement envahissant que je pourrais pas t’oublier même avec tous les efforts du monde. » Répliqua d’un ton moqueur, sans savoir s’il essayait de le rassurer ou au contraire de le repousser. De la curiosité mal placée hein ? Il pouvait comprendre, il pouvait même un peu trop bien comprendre à son goût. Charlie ne put en revanche s’empêcher de froncer les sourcils en entendant la suite. « C’est une menace ? » Ou bien c’était lui qui se faisait des idées encore ? Parce que si là Jethro savait pertinemment qu’il était son beau-frère et se comportait en conséquence, alors il n’avait pas envie de voir de quoi il serait capable s’il oubliait que Charlie était marié à sa sœur. Ok, il était un peu curieux, mais il savait aussi pertinemment que ce serait typiquement le genre de trucs qu’il aurait regretté le lendemain. Il enfouit brièvement son visage dans ses mains, fatigué et déçu par sa propre attitude. La proximité de Jethro, ses sourires, ses propositions à peine déguisées, tout ça devenait un peu trop réel au goût de de Charlie et il s’en voulait de ne pas avoir su se montrer plus raisonnable avant ça. Ça lui apprendrait à dire la vérité tiens ! « Rien, j’accepterais rien. » Répondit-il, tentant du mieux qu’il pouvait de reprendre un air sérieux et raisonnable. Il n’allait même pas reprocher à Jethro de s’être servi dans son verre – qui était apparu comme par miracle d’ailleurs, il commençait à comprendre ce qui s’était passé – au contraire même, il était presque content que ce soit lui qui boive à sa place. Il avait assez abusé comme ça pour ce soir et s’il voulait arrêter les frais il fallait qu’il se calme tout de suite. Il se força à détourner les yeux et prit une petite gorgée d’eau. Un sentiment intense de déception commença à l’envahir et il ne savait pas trop d’où il venait. Ou plutôt, il refusait d’admettre son origine. Jethro avait parlé de curiosité mal placée, Charlie avait l’impression que c’était la seule chose qui avait motivé ses actions depuis qu’il était entré dans le bar. L’envie de voir à quel point Jethro était sérieux et jusqu’où il voulait vraiment aller. Il était tellement con. Con et déçu. « J’ai juste dit ça pour pas te vexer. » Il haussa les épaules, évitant pourtant toujours son regard. Il trouvait ça plus sûr. Il avait l’impression de devenir une machine à faire des conneries dès qu’il regardait Jethro dans les yeux. « Je sais plus ce que je dis. Ça doit être la fatigue. » Décidément elle avait bon dos celle-là, quand il n’avait pas envie de parler à Jade, quand on lui demandait pourquoi il avait une tronche de déterré, il allait la ressortir à toutes les sauces jusqu’à ce qu’on arrête de le croire aussi facilement.

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Mais dans quel piège est-ce qu’il était venu se fourrer encore ? Il rêvait d’être chez lui en train de lire un bon bouquin, en sécurité, à l’abri, entouré de sa famille. Et à la place qu’est-ce qu’il foutait ? Il était dans un bar avec son beau-frère. Et le pire, le pire c’était qu’il ne regrettait pas tant que ça le confort de sa maison, il y avait même des moments où son cerveau arrêtait de lui dicter ce qu’il était censé ressentir et c’était tout l’inverse. Il était heureux d’être là, d’être là à faire des choses qu’il savait pertinemment qu’il n’aurait pas dû faire. Il regarda Jethro s’écarter avec un mélange de soulagement et de déception, il était vraiment incapable de savoir ce qu’il voulait à la fin. Enfin plus exactement il était incapable de se l’admettre à lui-même, et c’était plus facile de penser que ce qu’il voulait c’était être raisonnable, ça aidait à apaiser sa conscience. Il ne put réprimer un sourire en coin malgré tout en entendant le « conseil » de Jethro. « Je ne pense pas que la solution ce soit plus d’alcool. » Il ne protesta pourtant pas quand ce dernier inversa son verre d’eau avec le reste de son whisky, et il en reprit même une gorgée. Il l’avait payé, de toute façon il allait bien falloir qu’il le finisse non ? « Parce que j’aurais pu dire quelque chose qui t’aurait fait arrêter ? » Demanda-t-il d’un ton moqueur, légèrement curieux malgré tout. Il en doutait sincèrement, et Jethro ne disait probablement ça que pour lui faire remarquer qu’il ne l’avait pas non plus rembarré directement. Il sentit un soupçon de culpabilité en le réalisant, il avait raison. Il ne pouvait pas totalement blâmer l’alcool, ou la fatigue, sur ce coup là il avait surtout joué au con. Ça aurait été tellement simple de mentir et de dire que non, il ne se serait pas laissé draguer, à la place il avait décidé d’être honnête et ça lui avait appris une leçon. Il se força à soutenir le regard de Jethro, plus pour essayer de lui prouver qu’il ne lui faisait aucun effet que parce que c’était la vérité. « D’accord, laisse-moi imaginer. » Répliqua-t-il d’un ton tout sauf sincère. Il leva les yeux en l’air, l’air de réfléchir vraiment. Il les redescendit et fit mine d’observer Jethro sous toutes ses coutures, il se leva même à son tour pour se rapprocher, comme s’il avait besoin de voir de plus près. Il replongea son regard dans le sien après avoir fini sa petite comédie. « Non, ma réponse n’a pas changé. Même si j’étais pas marié, je me laisserais pas plus draguer. » Il haussa les épaules, exagérant sa totale indifférence. « C’est par fierté que tu veux pas me croire ? » Poursuivit-il, essayant de lui faire comprendre qu’il n’allait pas jouer à son petit jeu, même s’il n’avait pas reculé et repris place sur sa chaise pour autant. Bien au contraire même, il ne savait pas si c’était Jethro ou si c’était son équilibre qui n’était plus ce qu’il était mais il avait l’impression qu’ils étaient de plus en plus proches l’un de l’autre. Qu’est-ce que ça pouvait faire ? Il n’allait pas se laisser impressionner quand même. « Tu dois pas être mon type, qu’est-ce que tu veux que je te dise ? » Ajouta-t-il, essayant de le vexer gratuitement. Il fallait avouer que dans sa tête, son type c’était plutôt des personnes un peu plus féminines, donc il n’avait aucun mal à paraître sincère en le disant. « C’est bon maintenant ou tu comptes me reposer la question jusqu’à obtenir la réponse qui t’intéresse ? » Il avait essayé d’avoir un ton plus ferme en disant ça, et ça aurait probablement eu plus d’effet s’il avait pu s’empêcher de faire descendre ses yeux pour observer les lèvres de Jethro l’espace de quelques secondes. Ou si ce mouvement ne l’avait pas fait légèrement rougir. Ou s’il avait fait ne serait-ce qu'un pas en arrière au lieu de rester planté là devant lui.

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Il ne jouait pas le jeu ? Charlie avait déjà l’impression de beaucoup trop jouer le jeu comme ça, mais bien sûr ce n’était pas suffisant pour Jethro. Il voulait le pousser au maximum, voir jusqu’où il irait. Le médecin avait beau se dire ça, se rappeler que c’était un juste un jeu puéril pour son beau-frère, ça ne l’encourageait pas à prendre ses distances. Au contraire même, il n’aurait probablement pas autant pris ses aises si Jethro avait été plus sérieux, là il pouvait faire semblant que tout ceci n’était qu’un jeu pour lui aussi, qu’il n’était pas en train de se laisser séduire malgré lui. Faire semblant de faire des efforts, de tenter l’expérience, c’était la dernière carte qu’il avait eue à abattre, il n’avait plus d’idée à présent. Et vu la réaction de Jethro, ça n’avait absolument pas marché. Au contraire, ça avait presque l’air de l’avoir encouragé et Charlie se sentait démuni. Il se sentait aussi particulièrement con parce qu’il savait que si Jethro avait abandonné, il se serait surtout senti déçu. Il jouait au con, et le savoir ne l’aidait pas le moins du monde. Ça ajoutait juste encore une raison de se sentir coupable à la longue liste qu’il traînait partout avec lui. Il était foutu, la façon dont Jethro le regardait lui donnait de plus en plus envie de se prendre complètement au jeu et d’oublier qu’il était marié – et hétéro – pour de bon. Et les sous-entendus qu’il faisait le poussant à l’imaginer sans ses vêtements n’aidaient pas, mais alors pas du tout. Il sentit ses joues rosir à nouveau mais ne détourna pas les yeux pour autant. Il n’avait plus de munition, il ne savait plus quoi dire ni quoi faire pour forcer son beau-frère à arrêter. Au fond il avait peut-être su dès le début que la bataille était perdue d’avance, Jethro était bien plus borné que lui et il semblait pouvoir lire dans ses pensées tellement facilement que Charlie avait presque l’impression qu’il le comprenait mieux qu’il ne se comprenait lui-même. Il ne repoussa pas la main de Jethro, la laissant posée sur son torse comme si c’était sa place naturelle, sentant les battements de son coeur s’accélérer malgré lui. Une petite voix dans sa tête ne cessait de lui demander à quoi il jouait mais il ne l’écoutait plus. « Craquer ? » Il haussa un sourcil. « Je croyais qu’on ne faisait qu’imaginer. » Il avait essayé de dire ça d’un ton moqueur mais sa voix était sérieuse malgré lui. Pas autoritaire, non, sérieux parce qu’il savait que la situation était complètement en train de lui échapper et qu’il commençait tout doucement à l’accepter. « Tu vas jamais arrêter de me chercher, c’est ça ? » Ce n’était pas vraiment une question, plus une constatation, et il l’avait prononcée comme un aveu de faiblesse, comme une capitulation. Jethro voulait le faire craquer, il le savait depuis le début, et lui comme un con il s'était laissé entraîner dans des situations qui l’arrangeraient. Et le pire, c’était qu’il commençait à se demander s’il ne l’avait pas inconsciemment fait exprès. Il aurait pu refuser de l’amener à Brighton. Il aurait pu le laisser sur le bord de la route comme il avait failli le faire. Il aurait pu refuser de rentrer dans le bar. Il aurait pu refuser de boire. Il aurait pu refuser de se prêter à son petit jeu. A la place il était là à le fixer et à se demander combien de temps il allait lui falloir pour se lancer. Jethro l’avait dit lui-même non ? Ce n’était qu’une question de temps avant qu’il craque. Peut-être que le mieux c’était qu’il arrête de lutter, ça ne ferait que prolonger son calvaire. La vibration de son téléphone contre sa cuisse brisa le silence qui s’était installé entre eux et Charlie mit quelques secondes à se rendre compte qu’on l’appelait. Il sortit son téléphone de sa poche mais ne se recula qu’au moment où il lut l’identité de l’appelant. Il jeta un coup d’oeil à Jethro avant de décrocher. « Oui ? » « Ça va ? Ca fait un moment que tu ne m’as pas donné de nouvelles et c’est pas tellement ton genre de rentrer aussi tard. » Jade rigola à l’autre bout du fil et Charlie vérifia l’heure sur sa montre. Merde. « Oui, oui, désolé j’ai pas vu l’heure passer. On va décoller là, on devrait être là dans une demi-heure. » Jade avait presque l’air contente de savoir qu’il passait du temps avec Jethro, quelle ironie. Après un peu moins d’une minute de conversation il tendit le téléphone au jeune homme, osant à peine le regarder dans les yeux. « Elle veut te parler. » Il ne savait pas de quoi et très honnêtement il s’estimait juste heureux de ne pas s’être complètement trahi pendant que c’était son tour de lui parler. Il termina ce qu’il lui restait de whisky pendant que Jethro était encore au téléphone et s’assura auprès du barman que tout avait bien été payé, plus que jamais prêt à partir.

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Soulagement ou agacement, Charlie n’était pas certain de savoir quel sentiment prédominait en ce moment. Le barman lui avait assuré que tout était déjà payé, c’était déjà ça. Il tenta d’écouter ce que Jade pouvait bien raconter à Jethro à côté de lui mais il n’entendait rien. Au moins le jeune homme n’avait plus l’air d’humeur à rigoler alors il doutait qu’il se mette à lui raconter les détails de la soirée qu’ils étaient en train de passer. Ou plutôt qu’ils avaient passé. C’était définitivement l’heure de rentrer, et l’appel de sa femme avait au moins eu l’avantage de le dessaouler presque instantanément. Jethro paraissait, lui, carrément énervé de s’être fait interrompre et Charlie termina son verre d’eau, essayant d’oublier la sensation du poing de son beau-frère se refermant sur son t-shirt et l’attirant à lui. Il n’était vraiment pas passé loin de la catastrophe, c’était plutôt là-dessus qu’il devait se concentrer. Il se frotta vigoureusement le visage en attendant que Jethro raccroche, essayant de remettre de l’ordre dans ses idées. Il sentait un mélange de déception et de culpabilité l’envahir maintenant que le moment était passé et il avait beau se dire qu’il ne s’était rien passé, qu’il n’avait jamais rien eu l’intention de faire, il savait au fond que ce n’était pas tout à fait vrai. Il ferma brièvement les yeux en entendant Jethro confirmer à Jade qu’ils allaient rentrer, encore une fois, il ne savait pas s’il était soulagé ou déçu, ce qui était sûr c’était qu’il savait ce qu’il aurait dû ressentir et qu’il en était loin. Il avait passé la moitié de la soirée à tenter de le forcer à rentrer et maintenant qu’il avait gain de cause il n’en avait plus vraiment envie. Il était trop con. Bien sûr, il allait tout faire pour ne pas le montrer, il avait assez fait de conneries pour ce soir. De toute façon Jethro avait l’air trop énervé pour être capable de remarquer quoique ce soit. Il était en train de redescendre apparemment. Il récupéra son téléphone, ignorant la façon dont Jethro avait choisit de le lui rendre. Il avait envie de lui dire que ce n’était pas de sa faute si Jade avait appelé et qu’ils étaient obligés de rentrer, mais ça n’aurait rien changé, il le savait pertinemment. Et de toute façon il était censé être content, il avait enfin obtenu ce qu’il voulait. Il profita de l’air frais de Brighton en sortant du bar, ce coup de fil avait été comme une petite décharge électrique et il était à présent totalement alerte. Il se tourna vers Jethro. « Là-bas. » Il désigna d’un geste de la main sa voiture, elle se trouvait à à peine cinquante mètres d’eux, ils n’avaient presque qu’à traverser la route pour y être. Si on lui avait demandé s’il était en état de conduire il y a dix minutes il aurait rigolé et dit que non, mais il se sentait à présent parfaitement sobre et il voulait s’éviter l’aller-retour à Brighton le lendemain pour venir récupérer sa voiture s’ils la laissaient là et rentraient en uber. Il n’y avait presque plus aucune voiture à cette heure-ci et ils traversèrent sans attendre le feu vert ou chercher un passage piéton. Charlie se réfugia derrière le volant de la voiture et poussa un soupir une fois assis. Toute cette soirée lui paraissait irréelle, et il refusait de croire qu’elle venait de se dérouler de la façon dont ses souvenirs le lui montraient. Ne sachant pas quoi dire, il démarra en silence et s’élança sur la route, sans oser regarder Jethro. Il avait envie de lui demander de garder leur soirée entre eux tant qu’ils étaient encore dans cette espèce de petite bulle, mais faire ça ça aurait été admettre qu’il avait fait quelque chose de repréhensible, qui méritait qu’on garde secret, et ça c’était impossible. « Il doit y avoir une bouteille d’eau dans la portière si tu veux. » Dit-il donc à la place, n’ayant pas beaucoup d’espoir quant au fait qu’il s’en serve.