Fickle heart, fickle mind [Charlie]

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Charlie ne savait pas quoi dire, il était repassé en mode pilote automatique, refaisant le chemin jusque chez lui sans même avoir besoin d’y réfléchir. Il ne cessait de ressasser ce qui s’était passé ce soir-là, tout en sachant très bien qu’il n’était pas en train de rendre service à qui que ce soit. Il aurait bien mieux fait de tout oublier et de faire comme s’il ne s’était rien passé d’extraordinaire, mieux encore, comme s’il n’était jamais venu rejoindre Jethro dans ce bar. Il pouvait presque sentir son téléphone le brûler dans la poche de son jean, comme un rappel douloureux de ce qui l’attendait à la maison. Il ne pensait pas se faire engueuler au final, Jade avait plutôt eu l’air de prendre ça à la rigolade, en tout cas pour l’instant. Mais c’était la culpabilité qui lui faisait mal. Il ne cessait de se rassurer en se disant qu’il n’avait vraiment rien fait de mal, mais il refusait toujours d’y croire réellement. Les pensées qui lui avaient traversées l'esprit tout à l'heure suffisaient à le rendre honteux. Il fut tiré de ses pensées par la réponse puérile de Jethro. Il le regarda boire et jeter la bouteille d’eau là où il l’avait trouvée et pinça les lèvres. Dans d’autres circonstances il lui aurait probablement reproché son attitude merdique mais il ne s’en sentait pas la force. D’autant plus qu’il avait été très loin d’être un modèle de moralité ce soir-là. Et parler d’un geste d’énervement aussi anodin lui paraissait stupide après leur soirée. Il voulait croire que Jethro finirait par se calmer de lui-même, et il espérait que ce serait avant qu’ils arrivent. Il n’avait pas envie d’inventer une histoire à raconter à Jade pour expliquer son énervement. Toute son énergie était pour le moment utilisée pour se permettre de se mentir à lui-même, c’en aurait été trop. Il tourna à nouveau la tête vers son beau-frère en l’entendant demander, ou plutôt réclamer, qu’il s’arrête. Il agissait comme un gamin énervé en plein caprice, mais encore une fois il était assez mal placé pour lui faire la leçon. Sans compter qu’il comprenait son énervement et qu’il n’aurait rien pu dire ou faire pour l’apaiser. Il acquiesça, prononcer le moindre mot semblait lui demander un effort considérable et il préférait éviter s’il le pouvait. Ils étaient sur une petite route de campagne et il n’avait pas de place pour se garer sur le bord, il continua donc sur quelques mètres avant que Jethro ne recommence à s’énerver. « Ok, ok. » Se dépêcha-t-il de répondre, comme si ça allait suffire à le calmer. Il vérifia qu’aucune voiture n’était derrière eux et il s’arrêta comme il put sur le bord de la route. Il bloquait encore une grande partie de la voie mais il ne pouvait pas faire mieux s’il voulait s’arrêter tout de suite. Et pour l’instant il voulait éviter de contrarier encore plus Jethro s’il le pouvait. Il se sentait un peu penaud face à la colère de son beau-frère, il savait à peu près le gérer quand il cherchait à l’emmerder, mais pas quand il était comme ça. Il revérifia que la voie était libre et sortit lui aussi, l’air frais lui ferait du bien et il avait comme la sensation que Jethro allait encore plus s’énerver s’il ne sortait pas lui aussi. Il contourna la voiture pour se retrouver du côté passager et il s’écarta un peu de la route. Il avait réussi à s’arrêter en plein milieu d’une forêt et ils n’avaient pas beaucoup de place pour bouger avant de devoir s’y enfoncer. « Tu te sens mal ? » Il ne pouvait pas en être sûr, mais s’il avait besoin de vomir Charlie préférait encore que ce soit ici plutôt que dans sa voiture. Et ça aurait expliqué son insistance à vouloir s’arrêter. « Je peux faire quelque chose ? » Il se sentait démuni face à Jethro et il détestait ça.

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Charlie ne put réprimer un petit frisson en sentant le regard noir de Jethro se poser sur lui. De toute évidence il avait dit quelque chose qui ne lui avait pas plu. Il ne devait pas apprécier le fait qu’il fasse comme si de rien n’était. Lui était énervé depuis qu’ils étaient sorti du bar et Charlie se forçait à rester d’un calme olympien, il comprenait que ça ne fasse qu’énerver encore plus son beau-frère. Mais il ne savait pas comment réagir autrement, il ne savait pas contre qui s’énerver à part lui-même et très honnêtement il était encore en train de chercher à comprendre ce qu’il s’était passé et ce qu’il lui avait pris. Il voulait juste rentrer chez lui, éviter Jethro pendant un moment et oublier définitivement tout ce qu’il s’était passé depuis l’instant où il était venu récupérer son beau-frère. Bien sûr, Jethro ne l’entendait pas de cette oreille et il semblait déterminé à passer ses nerfs sur lui. Charlie ne savait, encore une fois, pas quoi répondre. Et malgré ce qu’avait l’air d’en penser Jethro, non il ne savait pas quoi faire pour le calmer, pour améliorer la situation merdique dans laquelle il s’était volontairement foutu. Il baissa les yeux, se disant que ça ne mènerait à rien de bon de le provoquer encore plus en soutenant son regard. S’il ne l’avait pas fait peut-être qu’il aurait pu le voir venir à temps pour l’empêcher de le repousser contre la voiture et de plaquer ses lèvres sur les siennes. Il aurait pour cela aussi fallu qu’il ait envie de l’en empêcher, ce qui n’était pas exactement le cas. Il se laissa même faire avec une facilité déconcertante, et passée la surprise initiale, il ferma les yeux et abandonna toute envie de se défendre. Peut-être était-ce dû à l’alcool mais le fait de l’embrasser lui paraissait parfaitement naturel. S’il n’avait pas senti l’odeur de Jethro et son corps contre le sien il aurait même presque pu oublier que c’était un homme qu’il était en train d’embrasser. Il glissa une main dans les cheveux de son beau-frère, comme pour l’empêcher de reculer, de s’éloigner de lui. Plus tard, il ne comprendrait probablement pas comment il avait pu se laisser entraîner aussi facilement, mais pour l’instant il n’était pas en capacité de réfléchir. Il voulait goûter, essayer, découvrir, et Jethro ne semblait pas s’y opposer, loin de là. Il écarta doucement ses lèvres, il en voulait plus, beaucoup plus, et il ne prenait conscience que maintenant de la frustration qu’il avait accumulée depuis des heures, des semaines, des années peut-être. S’il y avait eu un moment où il avait pu se détacher de Jethro et utiliser l’effet de surprise comme excuse pour s’être laissé faire, il était passé depuis bien longtemps. Il ne savait pas combien de temps s’était écoulé depuis que Jethro l’avait repoussé contre la voiture, ce qu’il savait c’était qu’il n’avait pas envie que ça s’arrête. Il avait même envie de beaucoup plus que ça, et ce fut quand ces pensées devinrent plus envahissantes que toutes les autres, au point qu’il était incapable de penser à autre chose, qu’il eut comme un électrochoc. Il détacha ses lèvres de celles de Jethro et le repoussa, aussi doucement qu’il en était capable. Il rouvrit les yeux mais les baissa aussitôt, se sentant incapable d’affronter son regard. Il se rendait compte de l’effort que s’écarter lui avait coûté et s’il recroisait son regard il avait peur de perdre le peu de contrôle qu’il lui restait. Il se força à s’écarter pour de bon et s’éloigna pour aller s’appuyer contre le capot. Qu’est-ce qu’il venait de faire au juste ? Il inspira un grand coup, essayant de se calmer et de recommencer à réfléchir. Son corps entier était en ébullition et il ne savait pas à quelle question répondre en premier. C’était à son tour d’avoir envie de casser quelque chose. S’il avait pensé se sentir coupable tout à l’heure, ce n’était rien en comparaison de ce qu’il ressentait maintenant et il avait heureusement le coupable idéal juste sous la main. La victime parfaite pour passer ses nerfs. Il se frotta le visage, essayant de reprendre ses esprits. Il était foutu, c’était fini. Jethro avait déjà assez de munition comme ça pour lui pourrir la vie mais là il venait de lui fournir un putain de lance-roquette. Et tout ça, c’était de sa faute à lui. « T’es content ? T’as eu ce que tu voulais ? » Son ton était sec mais sa voix était rauque et il pouvait lui-même y entendre toutes les différentes émotions qu’il ressentait mélangées. La colère, la honte, la peur, l’envie aussi, malgré lui. Il allait devoir rentrer et regarder Jethro raconter exactement ce qu'il avait fait à Jade. Il ne savait pas ce qu'il aurait à y gagner, à part un beau-frère en moins, mais ce n'était pas comme s'il comprenait les motivations derrière tout ce qu'il pouvait faire en temps normal.

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Charlie était énervé, contre lui, contre Jethro, contre tout et tout le monde. Qu’est-ce qu’il avait fait ? Il n’arrivait pas à réaliser, ou plutôt, il n’en avait pas envie. C’était à son tour d’avoir besoin d’air mais ses jambes avaient refusé de le porter plus loin que le capot de sa voiture alors c’était là-bas qu’il s’était installé, rêvant de pouvoir prendre un peu plus ses distances avec son beau-frère. Il ne lui faisait pas confiance mais surtout il ne se faisait pas confiance lui-même. Il avait l’impression que ses lèvres le brûlaient, l’impression de ne plus être lui-même, comme si quelqu’un avait pris possession de son corps. Il avait la sensation que son monde était en train de basculer et ça lui donnait le tournis, une sensation qui n’avait malheureusement rien à voir avec l’alcool. Il aurait préféré, comme ça il aurait été sûr que ça finirait par passer. Mais non là le lendemain il allait devoir se lever et affronter à nouveau ce qu’il avait fait. Il avait été tellement con ! Il n’en revenait pas lui-même. Tout ça avait semblé tellement facile à Jethro, c’était à peine s’il avait eu besoin de faire des efforts, et tout ça pour quoi ? Pour satisfaire une curiosité malsaine qu’il avait commencé à avoir ? Est-ce que ça en avait valu le coup ? Sa colère lui criait de penser que non, qu’il avait potentiellement foutu en l’air tout ce qu’il avait construit depuis presque vingt ans pour rien. Mais il n’arrivait pas à s’en convaincre totalement. S’il ne l’avait pas fait maintenant est-ce qu’il n’aurait pas juste été tenté d’essayer une autre fois ? Au moins maintenant il savait. Enfin, au moins en partie. Le problème dans son superbe raisonnement c’était que cet aperçu n’avait fait qu’éveiller encore plus sa curiosité. Il fut interrompu dans sa spirale de la honte par le klaxon de sa propre voiture. Il sursauta et se retourna par réflexe, voyant avec agacement à quel point Jethro semblait prendre toute cette situation à la légère. Il lui adressait le même sourire que d’habitude. Il avait déjà avoué qu’il avait obtenu ce qu’il voulait après tout, c’était un jeu pour lui et il avait gagné. Charlie, lui, risquait de tout perdre. Il secoua la tête, sa colère était loin d’être retombée mais il allait bien falloir qu’ils rentrent. Jade risquait déjà de poser des questions, ce n’était pas la peine d’en rajouter. Il se força à se décoller du capot et à revenir derrière le volant. Il referma la porte sans dire un mot, ralluma le contact et reprit la route. Il ne prononça pas un mot de tout le reste du trajet, faisant particulièrement attention à ne pas croiser le regard de Jethro, même par accident. Il n’avait plus la moindre envie de parler, et encore moins à son beau-frère. Encore une fois la cause de tous ses soucis. Il finit par se garer devant la maison, coupa le moteur et sortit de la voiture, ne cherchant pas à attendre Jethro. Il rentra dans la maison, laissant la porte ouverte derrière lui pour que son beau-frère puisse entrer à son tour. Ce n’était peut-être pas bien mature de vouloir à tout prix éviter la conversation mais il aurait encore préféré se faire écraser que de discuter à l’heure actuelle. Sa chance avait en tout cas tourné un peu, Jade semblait être partie se coucher. Il jeta un rapide coup d’oeil à Jethro, comme pour s’assurer qu’il était encore vivant, avant de monter à l’étage rejoindre sa femme, toujours sans un mot. Il referma la porte de leur chambre doucement derrière lui, ne tenant pas à la réveiller et à devoir expliquer pourquoi il rentrait si tard. Non, ses excuses bidons devraient attendre demain, qu’il ait au moins eu la nuit pour se remettre. Il se déshabilla et vint se glisser sous les draps, l’estomac tellement noué qu’il finit par se demander si ce n’était pas lui finalement qui allait être malade. Il se retourna, tournant le dos à sa femme. La regarder ne faisant qu’accentuer son sentiment de culpabilité et il n’avait vraiment pas besoin de ça. Il savait déjà qu’il n’allait pas fermer l’oeil de la nuit.